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nion, la tactique du gouvernement ? Il n’y paraît pas, puisque M. le garde des sceaux a déclaré devant la commission municipale qu’il n’envisageait pas comme M. Paul Bert l’application du concordat. « M. Paul Bert, a-t-il dit, veut l’appliquer d’une façon rigoureuse, à la lettre ; le gouvernement estime au contraire qu’il faut appliquer le concordat dans son esprit, qui n’est point évidemment un esprit de guerre, mais de paix… » S’il en est ainsi, pourquoi le gouvernement ne le dit-il pas sans détour quand il le faut ? Ce qu’il aurait de mieux à faire pour sa propre sûreté, comme pour le bien du pays, serait de s’inspirer dans sa conduite de la seule politique juste et prévoyante, au lieu de paraître toujours pactiser à demi avec des passions qu’il ne réussira pas sûrement à apaiser par ses complaisances, qui ne peuvent être qu’une menace croissante pour la paix publique comme pour tout gouvernement.

Que demande-t-on, après tout, au ministère ? On n’en est point certes à exiger de lui des actions extraordinaires, des succès merveilleux ; nous ne sommes pas si difficiles ; nous sommes payés, en France, pour être plus modestes dans nos vœux. On demanderait tout simplement au ministère d’être autant que possible un gouvernement de mesure et de raison, de s’éclairer à la lumière de cette expérience qui se déroule depuis quelques années et qui a été déjà fertile en mécomptes, de ne pas se croire obligé, pour servir un faux idéal républicain, de livrer à des fantaisies et à des passions de parti la paix religieuse, les finances, l’administration, la magistrature, ce qui reste de la grandeur militaire du pays. On pourrait lui demander de mettre dans ses actes un peu de la politique qu’il met dans ses discours et d’être un peu plus souvent d’accord avec lui-même, comme aussi de savoir se dégager des solidarités périlleuses. — Ce n’est point si aisé, dira-t-on ; ce n’est pas dans tous les cas impossible, et la meilleure preuve que le ministère peut, quand il le veut, soutenir avec quelque suctès des idées justes même devant la chambre telle qu’elle est, c’est ce qui vient d’arriver à l’occasion de cette question de l’organisation communale de Paris, qu’il a fallu enfin aborder dans la discussion municipale. Ici le gouvernement n’a point hésité et il a obtenu qu’on ne prît en considération ni un amendement proposant toute une autonomie communale parisienne, ni même un simple projet limité à l’institution d’une mairie centrale pour Paris. M. le ministre de l’iotèrieur a eu raison de tout : des développemens plus captieux que décisifs d’un nouveau député, M. Sigismond Lacroix, de la parole spirituelle et aimable de M. Anatole de la Forge, du long discours d’un ancien préfet de la Seine, M. Ch. Floquet. Il a réussi parce qu’il s’est montré résolu, parce qu’il avait aussi pour lui et toutes les considérations de prévoyance politique et l’expérience municipale que Paris a sous les yeux depuis quelques années.

Assurément, la question même de l’organisation parisienne n’est