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fût fixé non point à la date de la « concession, » mais à la date de la « mise en exploitation. » Ce n’était point un amendement, mais une interprétation, une rectification de texte; car, consultée dans son esprit, la clause ne pouvait pas avoir un autre sens. Il importait cependant aux compagnies de dissiper toute équivoque, et le gouvernement avait adhéré à leur désir d’autant plus volontiers que, devant un tribunal éclairé et impartial, la question aurait été résolue en faveur de l’interprétation réclamée par elles. On ne se doute pas de la ténacité avec laquelle cette disposition fut combattue. MM. de La Porte et Pelletan y dépensèrent notamment beaucoup d’éloquence. Leur motif, sinon leur excuse, c’est que l’obligation de rembourser en capital les frais d’établissement des lignes comptant moins de quinze ans d’exploitation devait rendre, en effet, plus difficile le rachat des concessions.

Mêmes objections contre la clause nouvelle qui stipule le remboursement, en capital, des travaux dits complémentaires exécutés par les compagnies sur la totalité de leur réseau[1]. Il est admis que, par suite de l’augmentation du trafic, les installations primitives deviennent insuffisantes : il faut chaque année agrandir des gares, prolonger des quais, établir des voies de manœuvre, etc.; en outre, dans un intérêt stratégique, le gouvernement peut exiger des travaux qui ne sont d’aucun profit pour le service ordinaire de l’exploitation. Depuis quelques années, les compagnies ne consacraient pas à cette catégorie de dépenses les sommes nécessaires, et cela se comprend ; car, menacées dans leur existence, elles devaient craindre de diminuer le produit net d’après lequel auraient été calculées les annuités à payer pour le rachat des concessions. La clause qu’elles ont demandée et obtenue leur permet de pourvoir avec sécurité à l’exécution de tous les travaux complémentaires. Il n’y a pas à supposer qu’elles engagent ces dépenses au-delà des besoins; le gouvernement s’est, d’ailleurs, réservé le droit de les autoriser. Toutefois, il s’agit là de sommes que l’on évalue, pour l’ensemble des compagnies, à plus d’un milliard, et les adversaires des conventions n’ont pas manqué de découvrir que l’obligation de rembourser ce milliard, jointe à l’exécution de la loi Montgolfier, aurait pour conséquence de surcharger la dépense au point d’annuler complètement, ou à peu près, le droit de rachat.

À ces objections le ministre des travaux publics et le rapporteur

  1. « En outre de l’annuité,.. la compagnie aura droit au remboursement des dépenses complémentaires autres que celles du matériel roulant, exécutées par elle, avec l’approbation du ministre des travaux publics, sur toutes les lignes de son réseau,.. sauf réduction de 1/15e pour chaque année écoulée depuis la clôture de l’exercice dans lequel auront été exécutés les travaux. »