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Perses : on a ainsi changé de royaume. L’auteur du Périple ne doit pas avoir visité en personne ce côté du Golfe-Persique, car sa description des localités est confuse et sobre à l’excès de détails. Il nous conduit d’abord dans le golfe Terabdon, a du milieu duquel, assure-t-il, se projette en mer un promontoire. » Un fleuve débouchant dans ce golfe permet aux navires de pénétrer dans l’intérieur des terres et d’arriver jusqu’à un petit marché du nom d’Oræa, situé près de l’embouchure. En arrière d’Oræa et à sept journées de marche de la mer, est assise la ville où réside le roi. Sommes-nous sur la côte de la Perside ou sur celle de la Gédrosie ? Avons-nous atteint sans nous en douter le territoire des Orites ? La question ne doit pas être facile à résoudre, puisqu’elle a découragé le savant Müller lui-même. Le pays produit beaucoup de blé, du vin, du riz, des dattes, mais sur le littoral on ne rencontre qu’une sorte de palmier nain, connu sous le nom de bdellium.

A la suite de cette contrée, la terre se courbe et forme une série de golfes très profonds qui se déploient comme un vaste croissant. Pour le coup, nous avons touché les rivages de l’Inde. Ce sont là les parties maritimes de la Scythie qui regardent le nord. — On sait qu’une dynastie d’Indo-Scythes remplaça, vers le milieu du IIe siècle avant Jésus-Christ, en l’année 120, les rois grecs de la Bactriane. — La côte est extrêmement basse; un grand fleuve, le plus grand fleuve de la Mer-Érythrée, le Sinthus, y débouche. Pourquoi donc appelons-nous Indus le Sindhu de la langue sanscrite ? Le marchand illettré est plus exact ici qu’Aristobule, Onésicrite, Ptolémée et Strabon.

Le Sinthus, qui donne son nom à la province du Sind, se décharge à la mer avec une telle abondance que, bien longtemps avant d’atteindre le rivage, on voit la mer blanchir par suite des eaux douces qui s’y mêlent. On reconnaît l’approche de la terre, quand on vient du large, à l’apparition de certains serpens de mer qu’on rencontre également sur les côtes de la Perside. Le Sinthus a sept branches; ces diverses branches ont malheureusement peu de profondeur et s’égarent dans des terrains marécageux : on n’y peut naviguer. La seule branche praticable est la branche du milieu, qui conduit au comptoir de Barbarikè. Ce n’est pas un mince embarras, quand on songe à la mobilité du lit de l’Indus, de trouver l’emplacement de ce fameux comptoir. Ritter y a vu le village actuel de Rechel; Vincent nous a désigné Soheri; Müller, avec raison, ne s’est pas prononcé. En face de l’embouchure s’étend une petite île; dépassez-la, vous trouverez en arrière, dans l’intérieur des terres, Minnagara, capitale de la Scythie maritime. « Cette ville, dit l’auteur du Périple, appartient à l’empire des Parthes, dont les