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à Coptos. J’ai dit plus haut qu’on pouvait reconnaître Myos-Hormos dans le port actuel de Cosseïr, ou du moins dans quelque anfractuosité des environs. Prenons donc notre point de départ de Myos-Hormos : 180 milles plus loin, sous le parallèle de 23° 55′, se présentera le port de Bérénice, abri plus sûr que Myos-Hormos, mais d’un accès périlleux et difficile, car on n’y arrive que par le golfe immonde, à travers de nombreux bancs de sable et de corail. Nous avons vu qu’une route mettait en communication Coptos et Bérénice. Au promontoire Lepté, aujourd’hui Bas Benass, se termine l’Egypte et commence la Barbarique. Sur le rivage habitent les Ichtyophages, qui vivent dispersés dans des huttes. Les tribus de l’intérieur, au nombre desquelles il faut compter les Agriophages et les Moschophages, obéissent à différens chefs ; leur territoire s’étend jusqu’à la hauteur de Méroé. De Syène jusqu’au confluent du Nil et de l’Astaboras, deux centurions romains comptèrent, au temps de Néron, 173 milles ; 70, de ce confluent à Méroé. Bruce place Méroé par 16° 15′de latitude nord. L’extrémité du territoire des Moschophages est marquée par une station éloignée de Bérénice d’environ 309 milles. Ce marché, que Müller a cru pouvoir placer sous le parallèle de 18" 31’, se nommait Ptolémaïs, et, pour le distinguer des autres villes qui devaient leur nom à la dynastie des Lagides, on l’appelait généralement Ptolémaïs des chasses ou des bêtes fauves. C’était, en effet, de ce port que partaient les chasseurs d’éléphans pour se répandre ensuite dans l’intérieur. On n’y pouvait aborder qu’avec des chaloupes, et les seuls produits qu’on eût chance d’y recueillir étaient, outre un peu d’ivoire, de l’écaille de tortue de terre et de mer, surtout de l’écaille blonde provenant de tortues à petite carapace.

À 300 milles environ de la Ptolémaïs des chasseurs, la côte forme un golfe par lequel on arrive au comptoir d’Adulis, fondé 330 ans avant Jésus-Christ, sous le règne de Psammétique, par des esclaves égyptiens fugitifs. Nous sommes dans les parages de Massouah : cherchez sur nos cartes modernes la baie d’Ansley, vous serez étonné de la précision des détails qui vont suivre ; il n’y a rien de tel que les caboteurs pour bien décrire une côte et garder un souvenir fidèle des moindres accidens du rivage. Remarquez à l’entrée du golfe cette île montagneuse que les marins anglais ont nommée, sur la foi de leurs pilotes arabes, l’île Dahalac ; les capitaines d’Alexandrie nous la signalaient déjà, ils l’avaient appelée l’île Orine. « C’est à l’île Orine, disaient-ils, qu’abordent aujourd’hui les vaisseaux ; ils y sont à l’abri des incursions des naturels du pays. Autrefois, ils jetaient l’ancre sous l’île de Diodore, — probablement l’île Dissi, — plus avancée dans le golfe, et si rapprochée du rivage que les barbares y pouvaient arriver de la côte à pied ou à la nage. » Sur