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les champs, mortels aux abeilles, du Pavot à opium, de jour en jour plus envahissant, il faudrait étudier les plantes à huile, telles que l’Arachide, le Sésame, le Ricin (il s’agit ici d’éclairage) ; les arbres à vomis, tels que le Rhus vernix et l’Elœococca, dont le suc jouit de propriétés insecticides et s’unit au précédent pour constituer la fameuse laque admirée du monde entier ; les arbres à suif ou à cire, sur lesquels ont tant écrit les anciens missionnaires et que multiplient les prescriptions de la religion bouddhique, car ce serait un péché grave de brûler sur les autels un suif de provenance animale. Consacrons du moins en terminant quelques lignes au Bambou, aux plantes textiles et aux plantes tinctoriales.

Le Bambou se voit partout en Chine, où il sert aux usages les plus divers. Il s’adapte particulièrement au climat, se plaît dans les parties chaudes et peut, dans les parties septentrionales, supporter une période plus réduite de végétation à cause de la rapidité de sa croissance. D’après les mesures qu’a prises Robert Fortune, qui fut envoyé, il y a une trentaine d’années, par le gouvernement anglais, pour étudier les ressources végétales du pays, la hauteur d’un tronc vigoureux de bambou y augmente en vingt-quatre heures de 0m,6 à 0m,9. Le tronc de cette Graminée, notamment de l’espèce qu’on plante auprès des pagodes, atteint en peu de mois 20 mètres de hauteur, privé de branches jusqu’au tiers. Le seul malheur de l’espèce, même sous le climat qui lui convient le mieux, c’est qu’elle meurt après sa floraison. Chose remarquable, tous les rameaux pris comme boutures à un Bambou meurent aussi, à ce qu’on affirme, quand le pied mère a fleuri et terminé sa vie. Dans sa jeunesse, le bambou qui sort de terre, semblable à une sorte d’asperge, constitue l’un des légumes les plus appréciés dans le pays. Quand ses pousses ont un an d’âge, on les fait macérer dans de l’eau de chaux, puis on les réduit en filasse ou en pulpe, selon qu’on veut en faire des cordes ou du papier. D’autres fois, en coupant les lanières de la plante dans le sens de sa longueur et en les tressant, on obtient les câbles dont on se sert pour haler les navires. Les feuilles, quand elles sont larges et fermes, sont employées à faire de jolis éventails. Mais les usages les plus importans sont ceux qu’on tire des troncs et des rameaux, selon leur grosseur. Le bambou fournit les petits bâtons qui tiennent lieu, dans le Céleste-Empire, de cuiller et de fourchette ; il fournit aussi des mâts et des vergues ; en unissant entre elles ses tiges, on en obtient même des voiles, et les annales de la Chine nous parlent d’un petit bateau creusé de toutes pièces dans le tronc d’un gros bambou. Tous les ustensiles de vannerie utiles à l’économie domestique peuvent se faire avec cette Graminée, paniers, treillages, claies, tamis ; lignes et barrages pour prendre le poisson ;