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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




30 septembre.

D’où vient que, malgré toutes les déclarations optimistes, malgré la paix évidente dans laquelle vit le pays, il y a un vague et indéfinissable sentiment de malaise et de fatigue qui se fait jour un peu partout, sous toutes les formes ? Il se peut sans doute qu’il y ait des intérêts qui souffrent ; des industries éprouvées, un certain ralentissement de travail et de prospérité dont tout le monde doit plus ou moins se ressentir ; c’est possible, et il faut bien qu’il en soit ainsi, que tout ne soit pas pour le mieux dans le domaine de l’activité matérielle, des iniérêts économiques, puisqu’il y a une décroissance sensible et caractéristique du commerce extérieur de la France, puisqu’il y a une diminution continue des recettes publiques qui laisse entrevoir des déficits croissans pour les prochains budgets. Les chiffres, qui sont inexorables, marquent les progrès de cette crise qui ne fait que s’étendre depuis quelques années, et qui pèse nécessairement sur toutes les classes de la population française. Il se peut que tout ce monde qui vit de son travail, de son industrie, de son commerce, de son activité soit disposé à se plaindre, parce qu’il est atteint dans son bien-être et dans ses ressources ; mais il est certain aussi qu’en dehors des souffrances matérielles, qui ont leur gravité et leur influence, il y a d’autres causes de cette fatigue, de ce malaise, qui sont visibles et saisissables un peu partout, même quand ils ne se traduisent pas par des votes. On aurait beau se faire illusion, qu’on l’avoue ou qu’on ne l’avoue pas, la vraie et première cause est d’un ordre tout politique. On sent bien que cette domination exclusive et jalouse des républicains, qui a commencé il y a cinq ou six ans, qui