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ne pouvait l’attribuer à des plaques aurorales réfléchies. De plus, il n’était pas rare de contempler pendant les nuits une lueur diffuse et phosphorescente, légèrement jaunâtre, qui éclairait l’horizon et faisait pâlir les étoiles. L’effet produit était sensiblement comparable à celui de la lune à demi voilée par les nuages.

M. Lenström et ses collaborateurs tentèrent, le 8 décembre 1882, de mesurer la hauteur d’un arc d’aurore au-dessus de la surface du globe. Ils se divisèrent en deux groupes et, à l’aide de théodolites, ils apprécièrent la distance angulaire du sommet de l’arc à l’horizon. Les deux stations étaient situées sur un même méridien magnétique à 4 kilomètres 1/2 de distance: un fil télégraphique, installé d’avance, permettait de correspondre durant les observations. Ils s’efforcèrent de se concerter pour viser le même point du météore, mais, à la suite d’essais réitérés, ils reconnurent que tel rayon, visible pour les uns, ne pouvait être aperçu des autres. Quant aux résultats des visées, ils furent inconciliables, puisque l’angle obtenu se trouva être plus grand pour le poste sud que pour le poste nord, quoique celui-ci, a priori se rapprochât davantage du météore. M. Lenström en conclut, comme d’ailleurs l’avait fait M. de La Rive, que chaque observateur voit son aurore, de même que chaque spectateur contemple son arc-en-ciel, et, de plus, que le phénomène se produit à une hauteur de quelques milliers de mètres à peine; il signale encore les résultats obtenus au Groenland par l’ingénieur Fritze, qui conduisent, au moins dans certains cas particuliers, à des nombres vingt fois plus faibles.

Lors de l’expédition suédoise de 1868 dans les régions polaires, on remarqua autour du bonnet des montagnes des flammes faibles ou des lueurs phosphorescentes. Ce fait, dont M. Lenström n’eut connaissance qu’en 1871, rapproché de certaines descriptions relatées par d’autres voyageurs, décida M. Lenström à essayer de provoquer ou de faciliter l’apparition du météore par des moyens artificiels. Les premières tentatives datent de 1871 et, à l’exemple de celles qui ont suivi, elles ont eu la Laponie pour théâtre. Comme, dès l’abord, l’entreprise avait été couronnée de succès, de nouvelles expériences furent reprises lors de l’expédition polaire finlandaise de 1882 et renouvelées deux fois sut deux cimes différentes, portant respectivement les noms fort peu harmonieux d’Oratunturi et de Pietarntunturi.

L’Oratunturi, haut de plus de 500 mètres au-dessus du niveau de la mer, est situé par 67° 21’ de latitude près du village de Sodankylä. Vers le point culminant de la montagne, un long fil de cuivre, replié convenablement sur lui-même, de manière à constituer une série de carreaux d’une surface totale de 900 mètres carrés, était