ce fanatisme sombre, cette éloquence ardente et hautaine qui donnèrent plus tard à sa physionomie un si étrange caractère.
Comme Calhoun, Henry Clay posait, pour la première fois, sa candidature à la présidence, et comme lui il devait poursuivre toute sa vie, sans jamais l’atteindre, ce but de son ambition. Speaker de la chambre des représentans depuis 1811, il eût sans doute emporté les suffrages si l’élection présidentielle eût appartenu au congrès. Il était alors dans tout l’éclat de sa renommée, qui avait grandi pendant la guerre, et que venait de consacrer son récent triomphe dans la question du Missouri. Jamais peut-être homme politique ne connut ni ne goûta davantage les enivremens de la faveur populaire ; il possédait à un égal degré les dons qui fascinent les foules et ceux qui dominent les assemblées. Lorsqu’il se rendait dans le Kentucky, qui avait été le théâtre de ses premiers succès et qui s’enorgueillissait de sa gloire, son voyage à travers les états de l’Ouest n’était qu’une marche triomphale; lorsqu’il prenait la parole dans le congrès, il tenait son auditoire suspendu à ses lèvres. Si l’on s’en rapporte au témoignage unanime de ses contemporains, la lecture de ses discours ne peut donner qu’une idée imparfaite de son éloquence. Il avait toutes les qualités extérieures de l’orateur : l’ampleur et l’autorité du geste, la dignité du maintien, le charme inexprimable d’un organe harmonieux et sonore, une taille élevée, une physionomie irrégulière et mobile qu’illuminaient le rayonnement de la pensée, la grâce du sourire, et la vivacité du regard. Homme de plaisir et joueur comme Fox, il rachetait, comme lui, ses défauts par l’élévation de son esprit et la générosité de sa nature; il avait, comme lui, la passion de la liberté et l’âme d’un patriote. A ses yeux, l’intérêt suprême devant lequel devaient s’effacer tous les autres était le maintien et raffermissement de l’Union : sa fidélité à cette grande cause a été l’honneur et a fait l’unité de sa vie publique.
Les chances de ces divers candidats à la présidence semblaient se balancer, lorsqu’on vit soudain apparaître une nouvelle et retentissante candidature. On a raconté que, dans un meeting ' tenu dans l’ouest de la Pensylvanie à l’occasion de l’élection présidentielle de 1824, un ouvrier s’était levé en agitant son chapeau et en criant: « Hurrah pour Jackson! » L’assemblée se serait, d’une voix unanime, associée à cette acclamation, que l’écho populaire aurait bientôt répétée des Alleghanys à l’Atlantique. Cette légende n’a rien de commun avec l’histoire. De sa retraite de l’Hermitage, où il avait paru vouloir s’ensevelir, Jackson épiait l’occasion d’une éclatante rentrée sur la scène politique. Dès le 20 juillet 1822, ses amis avaient provoqué une résolution par laquelle la législature du Tennessee