Page:Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 59.djvu/472

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bruit du mal inattendu qui venait de frapper M. le comte de Chambord, M. le comte de Paris s’est rendu, comme il le devait, à Frohsdorf, au chevet du prince si cruellement atteint. Cette réconciliation de famille, elle s’est manifestée sous une forme aussi émouvante que grave jusque dans ces dernières et suprêmes circonstances, autour du lit d’un mourant. Le jour où M. le comte de Chambord, vaincu par le mal, s’éteignait définitivement, où donc était la difficulté ? La conduite semblait toute tracée. C’était évidemment le rôle et le droit de celui qui recueillait le titre de M. le comte de Chambord, qui devenait à son tour le chef de la maison de France, de mener le deuil du prince. C’était tout simple, parfaitement légitime ; mais c’est ici que tout s’est compliqué de susceptibilités ou de prétentions visiblement peu bienveillantes pour les princes d’Orléans. Mme la comtesse de Chambord n’a-t-elle écouté que sa propre inspiration ? A-t-elle cédé à d’autres influences qui l’entourent ? Toujours est-il qu’elle a exprimé une volonté formelle devant laquelle il n’y avait qu’à s’incliner, que rien n’a pu fléchir. On a eu la pensée de faire à M. le comte de Paris une place qui n’était pas la sienne en réservant à d’autres princes la mission de conduire le deuil de M. le comte de Chambord. M. le comte de Paris ne pouvait dès lors que s’abstenir de paraître aux funérailles publiques, de se rendre à Goritz, où M. le comte de Chambord repose désormais dans l’éternelle paix, auprès du vieux roi Charles X ; il ne pouvait accepter le rôle qu’on lui faisait, de sorte qu’on a eu à Goritz le spectacle peu prévu des obsèques du chef de la maison de France conduites par des princes qui ne sont même pas français. Ce n’étaient pas là sans doute ce qu’attendaient les royalistes de France qui se sont rendus à Goritz, et qui paraissent avoir été un peu déçus par ces funérailles ainsi réglées. On a eu un peu de confusion là où tout aurait pu se passer simplement, selon toutes les convenances. En définitive, il n’en est ni plus ni moins, la situation reste la même. Évidemment, M. le comte de Paris n’a fait que ce qu’il devait depuis le commencement de la maladie de M. le comte de Chambord jusqu’à l’heure où le prince s’est éteint. Il a témoigné aussi toute sa déférence à Mme la comtesse de Chambord. Dans la cérémonie funèbre qui a été célébrée à Frohsdorf et qui avait un caractère plus particulièrement privé, il n’a élevé aucune difficulté, il a accepté tout ce qu’on a voulu. Le jour où les funérailles prenaient un caractère public à Goritz, il ne pouvait faire que ce qu’il a fait. Il ne pouvait accepter que la place qui lui était due ; dès qu’on lui refusait cette place, il n’avait plus qu’à se retirer sans insister. Il s’est abstenu, et, à parler franchement, ces incidens, nés peut-être de préoccupations assez malencontreuses, peuvent être plus favorables que nuisibles à la position que la mort de M. le comte de Chambord lui a créée. On a un peu cédé, dans ces règlemens d’étiquette funéraire, à