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nécessaires pour imprimer une nouvelle et toute-puissante impulsion à la colonisation, » il n’hésitait pas à annoncer « que le programme de colonisation précédemment arrêté pour 1880 serait exécuté dans les premiers mois de 1881[1] ! » Ces deux prévisions du gouverneur-général devaient être également démenties par l’événement.

En 1881, la convenance d’attribuer 50 millions à la colonisation de l’Algérie est bien, en effet, hautement proclamée par la commission du budget de la chambre des députés, et le gouvernement dépose un projet de loi conforme à ce vœu. Mais, à Paris, les choses en restent là. Du vote des 50 millions, il n’en est nullement question. Il faut que notre colonie se contente de la perspective de ce gros subside miroitant à ses yeux dans un avenir encore incertain et qui risque de reculer toujours ; cette perspective suffit à l’administration pour déclarer sans nul embarras, dans la session du conseil supérieur du gouvernement, au mois de novembre 1881 : « qu’il ne lui a pas été possible d’exécuter les travaux de tous les nouveaux villages dont les projets avaient été approuvés, » ajoutant avec la même désinvolture : « que la pénurie des ressources mises à sa disposition ne lui avait pas davantage permis d’imprimer toute l’activité désirable aux travaux d’achèvement des centres anciens[2]. » A la session suivante de 1882, même déception ; la situation s’est encore aggravée, et M. Tirman, le nouveau gouverneur-général, l’a fait ainsi connaître aux membres du conseil : « Depuis un an, les ressources affectées à la colonisation ayant fait entièrement défaut, on a été dans la douloureuse nécessité d’arrêter l’élan des colons et d’ajourner la création des centres du programme de 1882[3]. » Cependant M. Tirman s’empresse d’affirmer, comme l’a déjà fait son prédécesseur, « que le jour est prochain où les crédits nécessaires étant accordés, l’administration pourra se mettre résolument et rapidement à l’œuvre ; il espère qu’avant la fin de l’année, le parlement se sera prononcé sur le projet de loi déjà adopté par deux commissions du budget[4]. » Dans l’exposé de la situation de l’Algérie faisant suite à son discours, M. Tirman entre dans quelques détails sur la combinaison qui va enfin permettre de réaliser à bref délai ce fameux programme général de colonisation. Cependant, avec une sincérité qui lui fait honneur et grâce à son

  1. Discours de M. le gouverneur-général civil à l’ouverture de la session du conseil supérieur du gouvernement (6 décembre 1880, p. 11 et 12).
  2. Procès-verbaux de la session du conseil supérieur de l’Algérie (novembre 188), page 59).
  3. Discours du gouverneur-général civil à l’ouverture de la session du conseil supérieur du gouvernement (novembre 1882, page 7).
  4. Ibid.