le rétablissement de l’union dans la vieille maison royale de France. Il ne doutait pas des sentimens généreux des princes ; il n’avait jamais cru à ce qu’on appelait « la fusion, » à la réconciliation durable des principes, des souvenirs, des drapeaux, de la monarchie traditionnelle, à demi mystique, représentée par M. le comte de Chambord, et de la monarchie constitutionnelle de 1830. il ne préjugeait pas l’avenir, il voyait partout, pour le moment, une impossibilité de restauration. Il pensait ainsi, il l’avouait, — on ne l’écoutait pas ! Les royalistes naïfs se figuraient toujours qu’il n’y aurait eu qu’un mot à dire; les plus éclairés, les politiques, croyaient qu’avec un peu d’habileté, on aurait pu préparer le dénoûment désiré. Les uns et les autres, dans tous les cas, restaient persuadés que M. Thiers avait été, était encore le seul obstacle.
Eh bien ! M. Thiers avait subitement disparu de la scène, l’obstacle n’existait plus, et même les dernières élections radicales favorisaient un certain mouvement de réaction. A peine le 24 mai se trouvait-il accompli, le secret des arrière-pensées monarchistes de la politique « résolument conservatrice » s’échappait de toutes parts. Dès le 5 août 1873, M. le comte de Paris allait généreusement porter à Frohsdorf l’acte d’adhésion de sa famille et saluer, en M. le comte de Chambord, le chef de la maison de France ainsi reconstituée dans son unité. Aussitôt les esprits s’exaltaient au camp royaliste; on voyait déjà la monarchie rétablie, et assurément un grand pas avait été fait par cette réconciliation des princes. Monarchistes de toutes nuances, légitimistes, constitutionnels, se mettaient à l’œuvre pleins de confiance, impatiens de tracer le programme de cette restauration qui semblait désormais facile. Des commissions des divers groupes de la droite se réunissaient ; des plénipotentiaires couraient entre Versailles et Frohsdorf ou Salzbourg. Il s’agissait de savoir ce qu’on faisait, de tout régler avant de provoquer un vote de l’assemblée. Qu’arrivait-il alors? On avait fait un rêve! Au moment où l’on croyait saisir la réalité, tout s’évanouissait brusquement. Une lettre de M. le comte de Chambord, — aux derniers jours d’octobre, — suffisait pour dissiper toutes les illusions, en dévoilant une fois de plus l’inconciliable malentendu entre la France nouvelle et le chef de la maison royale. Le plus digne des princes, par sa candeur, sans le savoir, avait d’un mot rendu tout impossible, brisé ou ajourné toutes les espérances. Le coup avait été si rude que les amis les plus dévoués de M. le comte de Chambord se sentaient eux-mêmes déconcertés. Il n’y avait plus, pour l’instant, rien à faire. M. Thiers n’avait pas été étonné de la tentative, il ne s’étonnait pas de l’échec, et lorsque plus tard, rappelant le passé, on lui disait qu’il avait été trop prompt à se retirer au