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triomphe incontesté de la renaissance. Le premier de ces deux épisodes attestait quel culte réfléchi et raisonné l’art antique obtiendrait à l’avenir, et l’autre allait susciter les chefs-d’œuvre de Pérugin, de Botticelli, de Ghirlandaio et de Signorelli, en attendant Michel Ange. Si Rome avait paru offrir un cadre moins heureusement proportionné que l’aimable Florence à l’essor du XVe siècle, d’autres chefs-d’œuvre allaient lui rendre ce genre de. gloire éclatante et suprême qu’elle avait déjà connue dans l’antiquité, qu’elle retrouvait dans ses ruines et dans ses propres souvenirs.

On sait et les lecteurs de la Revue en particulier se rappellent que l’activité de M. Müntz ne s’est pas bornée aux trois volumes sur les Arts à la cour des papes. La série de ses nombreuses publications forme, au contraire, une histoire presque continue de l’art en Italie depuis la fin du monde antique jusqu’au XVIe siècle. Ses Études sur l’histoire de la peinture et de l’iconographie chrétiennes, sur les Anciennes églises et basiliques de Rome et sur leurs Mosaïques, observent les vicissitudes de l’art chrétien depuis les catacombes. Dans son brillant tableau des Précurseurs de la renaissance, il a résumé les intéressans efforts du moyen âge, et les préludes de l’incomparable essor qui a inauguré les temps modernes : Enfin, — sans parler de plusieurs études spéciales, comme l’Histoire de la tapisserie, — son volume sur Raphaël a couronné cette suite non interrompue de travaux variés, les uns ayant pour objet de démontrer beaucoup de nouveautés avec le secours des preuves inédites, les autres tendant à mettre en œuvre et à exposer les résultats acquis.

Il y a là plus qu’un salutaire exemple de travail persistant, énergique, bien ordonné et par là très fécond. Il y faut reconnaître une première application en France, sur une vaste période, de ce genre d’étude, à certains égards nouveau, qui consiste à introduire la critique et la recherche savante dans l’histoire de l’art et à constituer de la sorte les bases authentiques d’une telle histoire ; elle invoquera pour son entier achèvement une part de science technique et le sentiment réfléchi du beau.


En résumé, le cadre des études que conseille à l’École française de Rome la grande variété des ressources offertes par l’Italie est singulièrement vaste. On a essayé de le restreindre en se fixant une limite chronologique, la fin du XVe siècle environ[1], et l’on a

  1. Deux membres de l’École, MM. Mabilleau et George Duruy, ont toutefois publié de très utiles études sur le XVIe siècle, avec beaucoup d’informations inédites, l’un sur le cardinal Carlo Carafa, le célèbre neveu de Paul IV, l’autre sur le philosophe Cremonini, de l’école de Padoue.