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Barberini, à Rome, et il a constaté qu’on voyait au mur septentrional de la basilique un médaillon de Laurentius, le candidat opposé en 498 par le parti byzantin au pape Symmaque. Or précisément nous avons conservé un fragment de chronique papale ne contenant plus, peu s’en faut, que la biographie de Symmaque, et dont le rédacteur, favorable aux Orientaux et à Laurentius, traite avec une réelle acrimonie le pontife qui, pour le Liber pontificalis survivant, est le seul pape authentique. On peut juger par là combien ce schisme avait troublé profondément l’église et usurpé des expressions durables. L’image de l’antipape n’a pu être placée à Saint-Paul hors les Murs que dans un moment de triomphe de son règne contesté ; cette série de portraits devenait donc, comme la chronique pontificale avec ses versions diverses, une manière de Fastes, sur lesquels chacun voulait mettre la main.

Il n’en est que plus démontré que le Liber pontificalis est un ouvrage historique de la plus haute valeur. C’est là qu’il faut chercher l’histoire de l’exarchat de Ravenne, celle de la lutte constante des papes pour fonder le pouvoir temporel. Grégoire de Tours l’a connu. Paul Diacre, l’historien des Lombards, s’en est servi. Énumérant avec soin les édifices construits par les papes, et les donations faites ; à chaque église, cette chronique devient une source inépuisable d’informations utiles pour la topographie et l’archéologie romaines au moyen âge, pendant ces siècles obscurs où chaque indice a beaucoup de prix. On remarquera que, par suite de la date attribuée à la première rédaction, toutes les notices du VIe siècle se trouvent avoir l’autorité de récits contemporains. Les usages dont il y est témoigné sont ceux de l’église romaine au commencement de cette période. Les indications qu’on y trouve sur les monumens et sur les arts ont été recueillies au même temps, c’est-à-dire avant la guerre entre les Grecs et les Goths, alors que la plupart des édifices antiques et des basiliques chrétiennes subsistaient avec leurs inscriptions. — Il n’existe pourtant pas encore d’untel livre une édition critique, où le texte soit constitué par une étude raisonnée des variantes, de manière à montrer les influences diverses, puis commenté au point de vue de la science archéologique. C’est cet important travail qui figurera bientôt parmi les publications de l’École française de Rome, à côté du mémoire que M. l’abbé Duchesne a déjà donné.

Des cent cinquante manuscrits que M. l’abbé Duchesne a comparé, le plus grand nombre se trouver en Italie et surtout à Rome. L’immense, l’inépuisable source de document manuscrits, voilà ce qui manque à l’Ecole française d’Athènes et ce qui est le privilège de sa jeune sœur : Beaucoup de ces manuscrits nous transmettent les œuvres de l’antiquité, mais plus nombreux encore sont ceux qui