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ou de l’Asie bouddhiste. On dit que l’un des bas-reliefs de Palenqué offre l’image typique de Bouddha ; il en est qui trahissent par des traits évidens l’influence du bouddhisme. D’autre part, le calendrier thébain et celui de Mexico sont identiques. La céramique, la sculpture, l’affectation aux monumens de la forme pyramidale, l’usage des hiéroglyphes, certains détails caractéristiques dans la pose ou la coiffure des statues révèlent l’Egypte ou la Phénicie. Mais qui ne voit que ces visées, ingénieuses, si l’on veut, ne reposent sur rien de sérieux, et qu’il en est de même des assimilations tirées de la linguistique comparée des peuples de l’ancien et du nouveau continent ? Ces rapprochemens s’expliquent par la conformité de l’esprit humain, à la fois variable et possédant un fonds commun d’idées, d’instincts et de procédés. Ces similitudes prouvent, si l’on veut, l’unité de l’homme ; mais parce que l’homme d’Amérique, en inventant des méthodes, en créant des arts, en supputant la durée chronologique, aura rencontré des formules équivalentes, ou même identiques, à celles dont l’homme d’Asie ou d’Europe s’était servi, il ne s’ensuit pas que celui-ci ait dû les importer. Si quelques couples isolés ont pénétré en Amérique, ils s’y seront éteints presque sans influence sur l’art ou sur les races du pays où ils auraient un jour abordé. Mais si des tribus entières, avec leurs arts, leur idiome, leurs traditions et leur industrie s’étaient introduites sur le sol du nouveau continent, si des relations suivies de commerce, ou des colonies, y avaient été établies par des peuples déjà civilisés, ce ne seraient plus alors d’obscurs indices qu’on aurait rencontrés, mais des monumens entiers, des inscriptions exemptes d’incertitude. Il eût certainement été moins difficile à ces colons et à leurs descendans d’écrire en phénicien ou en égyptien, en chinois ou en sanscrit réel, que de couvrir les murs d’énigmes indéchiffrables qui ont dû demander des siècles pour être conçues et combinées, avant que l’idée vint aux artistes américains de les graver sur la pierre des édifices. Les races immigrées dont on croit reconnaître l’empreinte, en élevant de pareils monumens, auraient adopté pour les décorer les méthodes et le style de leur pays d’origine. Le bon sens dit qu’en initiant les Américains natifs aux pratiques de l’architecture, elles n’auraient pas eu l’idée d’inventer de toutes pièces un art nouveau, n’ayant avec celui de la mère patrie que de lointaines et faibles analogies. Et puis tout ce qu’on a voulu supposer tombe devant deux considérations qui priment toutes les autres : l’une est la certitude de l’extrême ancienneté de l’homme sur le sol américain, où il a été, comme en Europe, le compagnon des grands animaux de l’âge quaternaire ; l’autre est l’uniformité relative de la race cuivrée, si semblable à elle-même dans toute l’étendue de l’immense continent, dès que