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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 mai.

A entendre certains politiques du jour, M. le président du conseil tout le premier dans ses déclarations prétentieuses, M. le ministre de l’intérieur dans ses amplifications de voyage, on dirait que, s’il y a des embarras dans nos affaires, si tout va au hasard ou à la diable, c’est la faute de ce qui reste d’opposition dans les assemblées ou dans le pays. Il paraîtrait, M. le ministre de l’intérieur nous l’assure, que tout le mal viendrait de cet unique fait qu’il y a encore des minorités qui résistent, qui s’obstinent à défendre leur cause, qui refusent de rendre les armes devant le principe républicain.

Que les oppositions, aux prochains scrutins, soient chassées de leurs derniers retranchemens, que le département de la Charente, selon le mot de M. Waldeck-Rousseau à Angoulême, donne la main à la Bretagne pour former, avec les départemens de l’Est et du Midi, un seul faisceau républicain, que la majorité n’ait point sans cesse à compter avec des résistances qui la gênent ou l’irritent, tout ira pour le mieux dans la plus commode des républiques ! Il n’y aura plus aucune difficulté, rien ne s’opposera plus à notre tranquillité, à notre prospérité ! Le raisonnement est étrange et n’a malheureusement rien de nouveau. Un prédécesseur de M. Waldeck-Rousseau au ministère de l’intérieur, M. de Persigny, en son temps, parlait exactement de même au nom de l’empire. Lui aussi, il ne demandait rien de plus que de « compléter la victoire » pour le régime qu’il servait, d’en finir « avec les dissensions politiques » entretenues par des adversaires mal inspirés, par les anciens partis. Et quand M. le ministre de l’intérieur d’aujourd’hui, plus heureux que M. de Persigny, verrait son rêve se réaliser, quand il n’y aurait plus dans les chambres de la république une ombre d’opposition, pas même les « cinq » de l’empire, en