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Rome, à elle seule, avec la campagne romaine, est un champ de découvertes, incessantes. Ce sol a un langage et des réponses à point nommé pour qui l’interroge, et le hasard même y apporte des surprises fréquentes. Un recueil a donc été créé, depuis la fin de 1872, pour servir de chronique exclusivement romaine : c’est le Bulletin de la commission archéologique municipale, publication trimestrielle qui, non contente d’insérer des dissertations au sujet des monumens récemment rendus à la lumière, énumère et décrit un à un tous les objets que le sort des fouilles ou d’heureuses acquisitions apportent aux musées municipaux, ceux des. Conservateurs et du Capitole. Ajoutons à ces heureux efforts du gouvernement italien l’institution, encore peu développée, d’une École archéologique offrant à de jeunes érudits les moyens d’aller étudier dans les diverses contrées de l’Italie et en, Grèce, particulièrement, à Pompéi et à Athènes. Plusieurs hommes de mérite s’y sont déjà formés.

En résumé, les Allemands ont profité à Rome du sincère concours de toute une génération qui, pendant la première partie du XIXe siècle, sous l’influence d’un souffle de concorde et de paix, sans distinction de nationalités, s’était dévouée au généreux effort d’une réelle renaissance. L’œuvre à laquelle tous avaient travaillé, spécialement la France, ils l’ont continuée, non pas seuls, mais certainement avec une énergie particulière. Lorsque, il y a quatre ans, à l’occasion du cinquantième anniversaire de l’Institut de correspondance, les délégués des principales universités et sociétés savantes de l’Europe sont venus à Rome, c’était bien une fête allemande qu’on célébrait. Quant aux Italiens, après que leur pays a été pendant tant de siècles la terre adoptive, mais trop souvent aussi la proie de l’étranger, après qu’ils ont vu si longtemps les savans des autres peuples tirer profit avant eux et sans eux de leurs admirables trésors, ils réclament aujourd’hui leur part principale ; ils ne veulent plus que leurs objets d’art s’en aillent au dehors parer ces galeries publiques ou privées : dont les nations sont fières ; ils entendent publier eux-mêmes leurs conquêtes inédites et en instruire comme il convient le monde savant ; ils se flattent de pouvoir subvenir avec leurs propres forces, au progrès continu des fouilles nécessaires. Qui voudrait les en blâmer ? Ils ont eu dans tous les temps des antiquaires admirables parce que leur génie clairvoyant convient aux fines recherches ; il ne sera regrettable pour personne qu’ils reprennent leurs meilleures, traditions. Ce n’est pas à nous de nous plaindre de ces prises de possession, puisqu’elles profitent à la science et que nous avons un poste semblable à Athènes. Il s’agissait seulement de savoir comment l’École française pourrait, dans cet ardent milieu, se