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Vendée. Ce qu’on voit de bleus et de blancs, de volontaires et de sans-culottes, de conventionnels et de hussards Chamborand est vraiment prodigieux ! Parmi tous ces tableaux, ceux de MM. Le Blant, Scherrer et Moreau de Tours seuls méritent d’être mentionnés ; car pour le Joseph Barra que M. Wœrtz a peint dans une gamme de couleurs si effroyablement criarde, nous ne le citons qu’afin de poser une question. Barra était-il fantassin ou cavalier, tambour ou trompette ? Jusqu’ici, sur la foi des historiens, des peintres et des sculpteurs, on le croyait tambour. Il paraît qu’il a permuté, car M. Wœrtz, qui cite un document authentique, représente l’héroïque enfant avec l’uniforme des hussards.

On se rappelle sans doute les Derniers Momens de Maximilien de M. Jean-Paul Laurens. Changez les costumes des personnages et le lieu de la scène, et vous retrouverez dans la Mort du général Charette, de M. Julien Le Blant, le même groupe du condamné et d’un ami pleurant dans ses bras, le même officier venant prévenir que l’heure de l’exécution a sonné. Maximilien était posé de face, Charrette est vu de dos ; peut-être cela vaut-il moins ? La composition de M. Le Blant est toutefois préférable dans l’ensemble. Son tableau, bien que. de plus petite dimension que le Maximilien, a plus de grandeur et de pittoresque. Le décor représente une place publique de Nantes. A droite, près d’un mur de clôture contre lequel il va être fusillé, se tient le hardi Vendéen. Un officier républicain s’approche de lui, le chapeau à la main. A gauche, au troisième plan, s’avance, l’arme au bras, le peloton d’exécution. Au fond, perdue dans le brouillard du matin, toute une division est rangée en ligne de bataille. Ces soldats nous paraissent de formes quelque peu flottantes et indécises, On nous objectera l’éloignement, le petit jour, la pluie qui tombe ou le brouillard qui s’élève. N’importe ! toutes ces conditions optiques et atmosphériques n’autorisent pas des contours aussi flamboyans, des corps d’apparence aussi inconsistante. Et d’ailleurs, si le peintre admet qu’il pleuve très fort ou que le brouillard soit très opaque, pourquoi les figures de Charette et de l’officier se détachent-elles avec tant de netteté, comme éclairées par un rayon de soleil ? Le soleil luit pour tout le monde. — Dans le tableau de M. Scherrer, la petite garnison de Verdun, emportant le cadavre du commandant Beaurepaire, sort de la place et défile devant l’armée de Brunswick, qui lui rend les honneurs de la guerre. C’est une peinture décorative bien composée et peinte avec plus de largeur que de solidité. Les têtes manquent d’étude et les tonalités de justesse. M. Scherrer serait-il achromatopsique ? Il rend les rouges en rose. M. Moreau, de Tours, a brossé avec une grande énergie et une vigoureuse couleur Carnot à la bataille de Wattignies. Le chapeau