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tout cas, M. Miquel est d’avis que le moyen le plus efficace pour purifier l’atmosphère des villes consiste à conduire sans délai à l’égout tout ce qui est déjà putréfié ou susceptible d’entrer en putréfaction.

Malgré les récentes découvertes de M. Davaine, de M. Pasteur, et de quelques autres savans, les rapports qui existent entre les bactéries de l’air et les maladies zymotiques (maladies causées par un ferment) sont encore enveloppés d’une grande obscurité. On n’a encore réussi à démontrer l’existence d’un microbe spécifique que pour un très petit nombre d’affections. M. Miquel a essayé de simplifier les termes du problème en se contentant de confronter les fluctuations du nombre des bactéries avec celles du chiffre des décès enregistrés à Paris depuis trois ans et attribués aux maladies suivantes : fièvre typhoïde, variole, rougeole, scarlatine, coqueluche, affections diphtériques, dyssenterie, érysipèle, infection puerpérale, diarrhée cholériforme des jeunes enfans. Cette comparaison a montré que les crues des microbes sont presque toujours suivies, à courte échéance, d’une aggravation de la mortalité, sans qu’il y ait cependant un rapport direct entre le chiffre des bactéries et celui des décès. C’est une question qui demande évidemment, pour être tranchée, des recherches longtemps continuées.

Au point de vue de l’hygiène, un intérêt particulier s’attache aux expériences instituées dans les salles d’hôpitaux. M. Miquel a effectué, depuis 1878, un grand nombre d’analyses dans les salles de l’Hôtel-Dieu et de la Pitié. A l’Hôtel-Dieu, les moyennes mensuelles ont varié depuis 4,000 jusqu’à 7,500, quand l’air du parc de Montsouris ne contenait que 82 microbes par mètre cube. A la Pitié, les moyennes, beaucoup plus élevées en hiver qu’en été, approchent parfois de 29,000 ; la moyenne générale, déduite de quinze mois d’observations, est de 11,000 microbes par mètre cube d’air. Pendant les mois d’été, le nombre des bactéries est deux fois plus faible, sans doute parce qu’alors les fenêtres restent ouvertes une grande partie de la journée. L’atmosphère des salles se purifie alors, aux dépens, il est vrai, du quartier environnant. On n’a pas oublié l’épidémie de variole qui, en 1880, s’était développée autour de l’annexe de l’Hôtel-Dieu, Où était installé un dépôt de varioleux, et qui, après l’évacuation de l’annexe sur l’hôpital Saint-Antoine, se transporta dans les quartiers contigus au nouveau dépôt. C’est là un nouvel argument en faveur du déplacement des hôpitaux et de leur installation en plein air.

L’atmosphère des égouts, comme on pouvait s’y attendre, a été trouvée très chargée de bactéries. Dans l’égout de la rue de Rivoli, l’air en contient constamment de 800 à 900 par mètre cube. Quant à l’eau d’égout, elle renferme de 20 à 30 millions de microbes par litre, et lorsqu’elle entre en putréfaction, elle peut donner naissance à un nombre de bactéries mille fois plus élevé. Voici les résultats de quelques analyses exécutées sur des eaux de diverses provenances :