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maintenue constamment à une température de 30 à 35 degrés, qui paraît favorable au développement de la plupart des bactéries. La durée d’incubation, fort variable, est le plus souvent de 2 à 5 jours ; il est assez rare de voir apparaître les aiguës d’altération au bout de vingt-quatre heures, et encore plus rare de voir une conserve se troubler seulement au bout d’un mois. A Montsouris, ce n’est que vers le quarantième jour que ces conserves restées stériles sont définitivement supprimées, ce qui est plus que suffisant pour assurer la rigueur des statistiques. Mais pour obtenir des chiffres comparables, il faut user toujours du même liquide nutritif, car le degré de sensibilité ou d’altérabilité des divers liquides employés pour les besoins de la micrographie varie beaucoup. Ainsi M. Miquel a trouvé l’infusion de foin, tant vantée, 33 fois moins sensible que le bouillon Liebig neutralisé ; ce dernier, à son tour, l’est 4 fois moins que le bouillon de bœuf neutralisé, et 7 fois moins que le même bouillon neutralisé et salé au centième. On remarquera l’accroissement de sensibilité que produit ici une faible dose de sel marin ; il paraît, en effet, que le chlorure de sodium, loin de gêner l’évolution des germes de microbes, la favorise au contraire, mais seulement quand la dose de sel est modérée ; le maximum d’altérabilité a lieu pour la proportion de 7 à 8 grammes de sel par litre ; au-delà de 18 grammes, le sel agit comme antiseptique. — Le jus de veau, stérilisé par filtration sur le plâtre à la température ordinaire, a été trouvé 13 fois plus altérable que le bouillon Liebig stérilisé à 110 degrés, qui sert de type de comparaison[1]. il semble d’ailleurs que les liquides pourvus d’un degré de sensibilité élevé favorisent d’une manière spéciale le rajeunissement des bactériums, dont on voit alors augmenter la proportion par rapport aux bacilles et aux microcoques.

Ce qui vient d’être dit suffit pour montrer avec quel soin sont exécutées les recherches statistiques qui se poursuivent à Montsouris, et combien d’efforts ont été faits pour écarter toutes les causes d’erreur. Il semble donc que les moyennes établies par M. Miquel et ses collaborateurs puissent être acceptées avec confiance. En les comparant avec la température, l’état de sécheresse et d’humidité, etc., il est facile de saisir des relations constantes entre le chiffre des microbes et divers états météorologiques bien tranchés. En général, le chiffre des bactéries, peu élevé en hiver, croît au printemps, reste haut en été et baisse rapidement à la fin de l’automne ; cependant les variations sont moins régulières que dans le cas des moisissures, comme le montrent les moyennes mensuelles relatives à la période triennale 1880-1882, que nous mettons en regard des moyennes mensuelles des spores de cryptogames, pour la période quinquennale 1878-1882 :

  1. Le degré de sensibilité d’un liquide une fois déterminé par les comparaisons, les résultats qu’il fournit peuvent être réduits au liquide normal (bouillon Liebig).