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AUX
PORTRAITS DU SIECLE

Les personnes qui aiment à s’instruire et qui désireraient lire un bon article de doctrine, bien substantiel, sur les variations de l’école française depuis cent ans, sont prévenues de ne pas me suivre plus loin. Je ne viens pas faire de la critique d’art en règle ; de plus autorisés étudieront sans doute à ce point de vue l’exposition des portraits. Mon cas est bien moins prémédité. Le hasard, — qui s’appelait cette fois d’un beau nom, la charité, — a réuni dans un salon quelques-uns des plus marquans parmi les gens de ce siècle ; des générations séparées par les années, par les révolutions de la politique et du goût, sont assemblées dans le pêle-mêle d’une fête historique : on y rencontre les belles dames, les princes, les actrices, les écrivains, les généraux, Les hommes d’état, les gens de mérites divers qui se sont succédé, de Louis XVI à M. Grévy. Comme tout le monde, je suis entré un jour dans ce salon ; la compagnie qui s’y trouvait m’a séduit ; j’y suis revenu presque chaque matin, aux heures tranquilles et solitaires, écouter l’entretien de ces morts et de ces vivans. J’imagine que, dans la vallée de Josaphat, quelque historien incorrigible, oubliant ses terreurs et ses intérêts personnels, s’attardera sur le rebord de sa tombe pour regarder passer les ressuscités fameux et entendre leur déposition. Celui-là pourra enfin se vanter de connaître la vérité. Nous n’en sommes pas là. MM. les membres du comité de patronage font des miracles de bienfaisance, mais ils ne sont pas l’Éternel ; ils n’ont pu appeler