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l’accroissement de la vitesse, la hausse des salaires. La situation économique du pays ne comporte pas, d’ailleurs, des travaux publics entrepris sur l’échelle gigantesque où on les a conçus. L’agriculture manque de bras ; les chantiers gouvernementaux ou communaux en attirent un trop grand nombre. Le cadeau le plus utile à faire à l’agriculture, c’est moins encore de la dégrever que de ne pas lui arrachée les ouvriers qui lui sont nécessaires. On affirme que les négociations entre l’état et les compagnies, sont sur le point d’aboutir ; nous le souhaitons. Le gouvernement aurait renoncé à quelques-unes de ses exigences les plus déraisonnables ; il ne demanderait plus une baisse considérable des tarifs, La discussion porterait sur un point tout à fait nouveau ; les ministres, s’inspirant d’idées protectionnistes, voudraient faire des tarifs des chemins de fer une sorte de complément, d’auxiliaire ou de correctif des tarifs des douanes, relever les tarifs d’importation ou de transit, diminuer ceux d’exportation, Faire intervenir la politique protectionniste dans la fixation des tarifs de transports, ce serait une imprudence et une faute dont la France ne tarderait pas à être la victime, au grand profit d’Anvers, du Saint-Gothard et de Gênes. Nous aimons à croire que le gouvernement renoncera encore à cette prétention. Alors, si l’on se contente de faire 500 ou 600 kilomètres de chemins de fer nouveaux par année, si l’on consacre ainsi un quart de siècle à l’exécution du plan Freycinet, si même pour ralentir un peu moins l’exécution de ce fameux programme, on se décide à soumettre au régime de la voie étroite une partie des voies ferrées projetées, on aura réglé, au grand avantage du budget, la question à la fois si simple et si intentionnellement compliquée du régime des voies ferrées.

Néanmoins le budget extraordinaire persisterait avec des chiffres de 3 ou 400 millions par année. La guerre, la marine, les postes, les rivières, les canaux, les ports, les chemins vicinaux, les écoles, se partageraient encore avidement ces 3 ou 400 millions. Ce serait un abus qui maintiendrait l’enchevêtrement et les embarras de nos finances. Le budget extraordinaire doit complètement disparaître. Rien ne le justifie plus. Comprend-on, par exemple, le budget extraordinaire du ministère de la guerre treize ans après la paix, car nous parlons ici du budget de 1884 et des suivans ? Est-ce que les 2 milliards des deux comptes de liquidation et le demi-milliard prélevé sur les budgets extraordinaires de 1880, 1881, 1882 et 1885 n’auront pas abondamment fourni les ressources nécessaires pour notre armement, la reconstitution de notre matériel et l’achèvement de nos places fortes ? Le maintien d’un budget extraordinaire de la guerre, qui se joint aux 605 millions que le budget ordinaire alloue généreusement à cette administration, est un encouragement au gaspillage : c’est plutôt une cause de désorganisation ; les ministres et