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LE
BUDGET DE 1884
ET LA
SITUATION FINANCIERE DE LA FRANCE

Il y a juste un an, nous examinions ici la situation des finances françaises[1]. Nous le faisions avec la sincérité qui, malgré l’opinion de quelques étourdis, est un devoir patriotique en pareil cas. Rien n’est plus puéril et plus superflu que de chercher à dissimuler des périls qu’on ne peut surmonter qu’à force de franchise et de résolution. Rien de plus injurieux non plus pour une grande nation démocratique que de la traiter en petite-maîtresse qui a ses nerfs, ses susceptibilités, qui redoute toute révélation désagréable et qui ne veut jamais avouer qu’elle ait commis des fautes, ni reconnaître qu’elle doive s’efforcer de les réparer. Dans les questions de finances surtout, il faut parler net, sans ambages et sans hésitation. C’est ce devoir que nous avons rempli l’an dernier et dont nous allons nous acquitter aujourd’hui de nouveau. Il y a un an, la situation commençait à être compromise ; cette année, elle est plus mauvaise ; dans deux ou trois ans, si l’on n’y prenait garde, elle serait tout à fait grave. Ces mots peuvent paraître empreints d’une certaine brutalité ; ils n’ont cependant rien d’excessif. Un simple, coup d’œil jeté sur les élémens principaux de nos finances les justifie. Depuis la guerre, on le sait, la France a traversé deux périodes très différentes ; l’une qui, de 1871, s’étend jusqu’à 1875, période

  1. Voyez la Revue du 1er avril 1882.