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moins considérables, qui lui reconnaissent depuis une époque très reculée une sorte de. suzeraineté, et qui, à ce titre, lui paient annuellement ou tous les cinq ans, divers tributs en nature. Tels sont le Népaul, la Corée, la Birmanie, le royaume de Siam, l’Annam et les îles Liou-Chou dans la mer de Chiner. Entre tous, le roi de Corée s’est toujours fait remarquer par la régularité avec laquelle il a envoyé à Pékin ses présens et ses ambassadeurs. En 1694, un souverain de ce pays barbare auquel vint le désir, — étrange dans ces contrées, — de couronner sa femme, poussa la condescendance jusqu’à solliciter de l’empereur de Chine l’autorisation d’accomplir cet acte. De nos jours, à la suite d’une sanglante révolution qui obligea le roi et la reine à prendre la fuite, la Chine a replacé les fugitifs sur leur trône, punis elle a laissé dans Séoul, leur capitale, une garnison très forte. Aujourd’hui c’est plus qu’un protectorat qu’exerce le Céleste-Empire, si ce n’est pas tout à fait une prise de possession. L’Angleterre et d’autres puissances qui désirent passer un traité de commerce avec la Corée, — mais avec la Corée seulement, — ont demandé des explications. M. Bourée, notre ministre à Pékin, est tellement persuadé d’une connexité complète entre le Céleste-Empire et son tributaire, que dans le traité qu’il demande à ce dernier, il exige pour nos missionnaires les droits dont ils jouissent en Chine, c’est-à-dire ceux de prêcher l’évangile à ciel ouvert et de construire des églises.

Depuis 1768, époque où les Chinois passèrent le Thibet pour combattre le rajah de Ghoorka, le Népaul est dans l’humiliante obligation de se reconnaître leur tributaire. C’est de ce pays, de Ghoorka, proche de l’Hindoustan, qu’est sortie la dynastie des rajahs qui règne encore aujourd’hui à Khamandou, la capitale du Népaul. Cette principauté pittoresque, appelée la Suisse asiatique, située au Nord, entre une vice-royauté chinoise, et au Sud, sur les limites d’une vice-royauté anglaise, ne garde son indépendance qu’en se faisant humble avec ses gros voisins. Tous les cinq ans, une ambassade part de Khamandou pour Pékin, et dépose aux pieds du trône impérial quelques présens. Le rajah actuel, quoique très réservé, voit son peuple fatalement entraîné vers le joug anglais. Tôt ou tard, comme tant d’autres rois, ou princes indiens, il ne sera plus qu’un pâle personnage à leur solde. Ce jour-là, l’Angleterre se donnera le plaisir d’aviser l’empereur de Chine qu’il n’ait plus à compter sur les hommages et les tributs du Népaul. Comme on le verra plus loin, ce ne sera pas la première fois qu’il aura reçu un semblable avis.

Ce fut en 1769, après une bataille sanglante qui fut livrée entre Chinois et Birmans, que ces derniers, vaincus, consentirent à