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l’âge de la pierre polie ou « robenhausien. » On aurait alors utilisé comme lieux de sépulture les réduits et les grottes habitées antérieurement par l’homme de la Madeleine, qui, lui, ne pratiquait pas ce mode d’ensevelissement. Cette circonstance, d’ailleurs, explique naturellement, comme nous l’avons déjà dit, la rareté des ossemens de cet âge, rareté singulière au premier abord, si l’on s’attache à la multitude des produits de l’industrie. L’auteur que nous suivons ne supplée que bien imparfaitement à cette lacune par des inductions tirées de l’étude des diverses représentations humaines dues aux dessinateurs magdaléniens. Les traits que l’auteur prend pour des poils et qui témoigneraient de la villosité des hommes de ce temps, ne seraient-ils pas plutôt des indications grossières de vêtemens appliqués sur le corps et provenant de la dépouille des animaux ? Il est certain que de pareilles œuvres, en leur attribuant une certaine naïveté dans le rendu, ne sauraient reproduire que des contours approximatifs, analogues à ceux que trace sur nos murs la main furtive des enfans ou celle des personnes dont le dessin n’a pour guide que le seul instinct. Pour M. de Mortillet, la race européenne magdalénienne n’aurait été qu’un prolongement modifié de celle de Chelles et du Moustier. Les mélanges par migration, la coexistence de plusieurs races différant par le crâne, brachycépales et dolichocéphales juxtaposés, seraient postérieurs au quaternaire récent, postérieurs à l’extinction du mammouth et au retrait du renne se repliant vers le nord. Alors serait venu un âge pendant lequel le climat s’adoucissant de nouveau, les glaciers s’étant retirés jusqu’au pied des montagnes, la mer ayant abandonné le nord de l’Europe pour se renfermer dans ses limites actuelles, une ère nouvelle aurait été inaugurée. C’est cette ère de développement et d’activité continus, dont les progrès nous conduiraient enfin de terme en terme jusqu’à l’invention des métaux et ensuite jusqu’à l’histoire proprement dite. Mais cette période dernière comprend elle-même plusieurs sous-périodes. Les métaux sont d’abord inconnus, et en admettant même, ce qui est fort possible, que leur usage ait été découvert plus tôt sur un point que sur un autre, en Asie qu’en Europe, par exemple, sur les lieux mêmes où ils auraient été trouvés et mis en œuvre avant de l’être ailleurs, il a existé forcément une période pendant laquelle la pierre était encore la seule matière employée pour la confection des instrumens de travail. Certains arts, point de départ nécessaire de toute société, avaient pourtant commencé à être exercés : ainsi, la domestication des animaux utiles, à commencer par le chien, l’agriculture et, par suite, l’adoption de certaines plantes alimentaires, l’usage de la poterie, enfin un groupement des hommes et de leurs habitations en vue d’une défense commune, en vue aussi