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encore exposé avec beaucoup de talent les raisons qui plaident en faveur du système géogenique développé par M. Lowthian Green[1] sous le nom de « système tétraédrique. » D’après ce système, la permanence des masses continentales et leur disposition dans un ordre déterminé autour du pôle arctique tiendrait à une loi primordiale dépendant de la structure même et des résultats de la contraction du globe terrestre à travers les périodes géologiques. Notre planète, d’abord fluide, puis solidifiée à la surface et obéissant, à mesure qu’elle se consolidait, à un mouvement de retrait, aurait pris au moins en gros une forme tétraédrique, en partie masquée par la mobilité de la masse liquide des océans, appréciable pourtant, si l’on fait abstraction de cette masse, pour ne considérer que la charpente et surtout les parties exondées et saillantes dans leurs rapports avec les parties déprimées et immergées qui répondent aux principales mers.

Pour faire admettre la possibilité de cette sorte d’écrasement du sphéroïde terrestre, M. Green et d’autres savans se sont appuyés sur des expériences fort délicates et concluantes qui justifient pleinement la supposition que l’écorce du globe aurait affecté en s’affaissant la figure tétraédrique, destinée, ajoute le géologue français qui nous sert de guide, « à lui assurer le plus longtemps possible la conservation de sa superficie. » — Mais, ces prémisses une fois concédées, il suffit de placer le tétraèdre terrestre de manière à ce que l’une de ses faces corresponde au pôle arctique et la pointe opposée à cette face au pôle antarctique pour obtenir aussitôt la dépression représentée par une mer occupant le premier de ces pôles, de même que la calotte saillante qui se montre à l’autre. Dès lors aussi, les trois pointes restantes du tétraèdre coïncideront avec les trois saillies continentales groupées dans l’hémisphère boréal autour de la dépression arctique et les arêtes de ces pointes marqueront les appendices, atténués vers l’hémisphère austral, des trois masses continentales. Au contraire, les trois faces allant aboutir à la saillie qui perce au pôle antarctique formeront le vaste océan austral, dont le prolongement dans la direction du nord donne lieu à trois mers : Pacifique, Atlantique et Indienne, terminées en sens inverse des continens qu’elles séparent. Il n’est pas jusqu’à la dépression méditerranéenne qui coupe les continens par le milieu et à la déviation vers l’est que présente leur pointe méridionale qui ne soient expliquées par le système de M. Green, qui a le mérite, selon M, de Lapparent, « de faire rentrer ces anomalies apparentes dans le cadre même de la symétrie tétraédrique. » En insistant sur une hypothèse encore nouvelle, mais que ses applications déjà variées, autant

  1. Vestiges of the moltett Globe. London, 1875.