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ESQUISSES LITTÉRAIRES


GEORGE ELIOT


I.

L’ÂME ET LE TALENT.


I.

Certes les louanges n’ont pas manqué à la femme éminente que l’Angleterre a perdue il y a deux ans, cependant il me semble qu’il en est une, et la mieux méritée peut-être, qui a été omise généralement : c’est qu’il lui a été donné d’obtenir un des triomphes les plus rares qu’il se puisse remporter, le triomphe sur l’esprit de système. Ce triomphe, elle l’a doublement obtenu, car elle est parvenue à sauver, et son talent, et sa nature morale, de la tyrannie de ce monstre qui a fait en littérature tant d’œuvres mortes ou avortées, et dans le monde social tant de malfaisans fanatiques et de néfastes sectaires. George Eliot avait des doctrines fort tranchées, et qui, sans être aussi dangereuses que quelques-uns le prétendent, ne s’accordent pas précisément avec celles qui sont, et seront encore longtemps, la base et l’appui de nos sociétés. Ce qui est certain, c’est que, dangereuses ou non, hétérodoxes