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ESSAIS
DE
PSYCHOLOGIE SOCIALE

I.
L’HÉRÉDITÉ INTELLECTUELLE ET MORALE.

Ceux qui peuvent soustraire un instant leur esprit aux préoccupations de la politique et s’intéresser encore au drame des idées trouvent un émouvant spectacle dans le grand effort tenté par les sciences positives pour tout conquérir dans la vie de l’homme, la conscience aussi bien que l’organisme, pour étendre sur la liberté morale le niveau du déterminisme universel et rattacher à l’empire croissant des lois physiques tout ce qui jusqu’alors semblait constituer une nature d’un genre à part au milieu de la nature et comme un état dans l’état. La personnalité humaine est successivement chassée de toutes ses positions et menacée dans son dernier refuge par l’invasion de la science.

Il est curieux de suivre jusque dans la littérature le succès de ces tentatives. Voyez ce qui se passe dans ces domaines réservés à l’imagination et à la passion et qui semblaient le mieux à l’abri, le roman et le drame. Dans la plupart des œuvres qu’on nous donne sous ce nom, ce qui domine aujourd’hui, c’est la physiologie, et plus encore la pathologie, c’est-à-dire la physiologie troublée. Particulièrement dans le roman, si l’on excepte quelques écrivains délicats,