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Avec celui de 1694, le tremblement de terre de 1857 est le plus violent dont la Basilicate ait gardé le souvenir depuis celui de 1273, sur lequel on trouve des renseignemens précieux dans les Regesta de Charles d’Anjou. Mais l’histoire de Potenza se compose en grande partie de catastrophes plus ou moins graves de même nature. On s’étonne vraiment que les hommes continuent à habiter une ville située dans ces conditions et si souvent ruinée. En revanche, on doit s’attendre par avance à n’y trouver aucun monument ancien. C’est ce qui est en effet, et comme édifices comptant plusieurs siècles d’existence, on ne saurait citer à Potenza que le municipe, qui est une construction de l’époque angevine fort défigurée, et la petite église de San-Michèle. Celle-ci n’est signalée ni par Schulz ni par aucun de ceux qui ont jusqu’ici parlé des monumens du midi de l’Italie. C’est un édifice du XIe siècle, d’une simplicité rustique. Sa nef principale est garnie de piliers carrés en maçonnerie, que surmontent des chapiteaux prismatiques. Malgré sa nudité et son peu de mérite d’art, cette église a une véritable importance pour l’histoire locale.

Potenza est la Potentia des anciens. On n’a aucune trace de son existence aux temps où la Lucanie était indépendante, et il y a d’assez grandes probabilités qu’elle ne datait que de la période romaine, où une ville se serait naturellement formée de l’intersection des deux voies importantes qui menaient, l’une de l’Apulie dans le Bruttium, l’autre de Salerne à Tarente, autrement dit de la Campanie dans ce qui s’appelait alors la Calabre, traversant mutes les deux la Lucanie d’outre en outre dans deux directions qui se coupent à angle droit. Potentia n’est d’ailleurs mentionnée qu’en passant dans les énumérations géographiques. Les textes littéraires ne nous apprennent rien à son sujet ; ce sont les inscriptions seules qui ont montré que sous l’empire c’était un municipe très important, la plus considérable et la plus florissante avec Gumentum (auprès de Saponara) parmi les villes de l’intérieur de la Lucanie. Mais la Potentia romaine n’occupait pas le site de la Potenza d’aujourd’hui. Elle était dans le fond de la vallée du Rasiento, au lieu appelé La Murata, tout auprès de la station du chemin de fer et de l’autre côté de la rivière. L’emplacement en a été depuis longtemps reconnu. On n’y voit au-dessus du sol que quelques informes lambeaux de maçonneries romaines ; mais toutes les fois qu’on y creuse la terre on met au jour des débris antiques. C’est de là que proviennent toutes les inscriptions latines qui se voient dans la Potenza moderne et y ont été portées à diverses époques.

Quand s’est opéré le déplacement de la population, le transport de la ville de la vallée sur la montagne ? On ne possède à cet égard aucun document positif ni même aucune tradition précise. Mais