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ce qui tenait à la politique était retenu aux bureaux de la police et, par conséquent, exclu de la Bibliothèque. En province, le défaut d’ordre était bien plus grave : l’administrateur de la Bibliothèque imagina de dresser l’inventaire des envois par département et il constata qu’en deux ans la préfecture des Bouches-du-Rhône n’avait adressé à Paris que vingt ouvrages. Si cela se passait ainsi à Marseille et à Aix, que devait-il en être dans d’autres départemens ? Aussi, en plus d’une préfecture, une année s’écoulait-elle sans envoi. Aux plaintes de la Bibliothèque répondaient les récriminations des inspecteurs de la librairie qui taxaient d’importunité ses justes doléances.

A part le court ministère de M. Delangle en 1859 et la direction en 1869 de M. Juillerat, la lutte ne cessa pas entre M. Taschereau et les bureaux de l’intérieur. On nous assure que l’administration actuelle met du zèle à faire droit aux réclamations de la Bibliothèque. Ce bon vouloir De sert qu’à démontrer les lacunes de la loi. Il est évident qu’il serait injuste de s’en prendre aux hommes. C’est l’institution elle-même qui est défectueuse.

Avant de chercher le remède, essayons donc de fixer avec quelque exactitude l’état présent du dépôt légal.


III

La législation du dépôt est tout entière dans les article 3 et 4 de la loi du 30 juillet 1881, qui a mis fin pour un temps à la confusion devenue inextricable de nos lois de presse. « Au moment de la publication de tout imprimé, dit l’article 3, il en sera fait, par l’imprimeur, sous peine d’une amende de 16 francs à 300 francs, un dépôt de deux exemplaires destiné aux collections nationales. » L’article 4 ajoute : « Les dispositions qui précèdent sont applicables à tous les genres d’imprimés ou de reproductions destinés à être publiés. Toutefois le dépôt sera de trois exemplaires pour les estampes, la musique et, en général, les reproductions : autres que les imprimés. »

Cette nouvelle législation a un mérite, celui de mettre fin aux équivoques, d’atteindre, en comblant les lacunes, un grand nombre de publications qui échappaient autrefois à l’action de la loi. Ainsi les journaux, la musique, les photographies, les cartes géographiques en plusieurs cas ne parvenaient pas au dépôt légal, et leurs imprimeurs se croyaient affranchis de toute obligation. Désormais, il n’y a plus d’exception, le texte est général, il est absolu. Le moment