Page:Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 55.djvu/471

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 janvier.

On dirait que la mort s’est plu à marquer de son sceau funèbre ce mystérieux passage d’une année à l’autre et a voulu rappeler qu’elle avait, elle aussi, son rôle dans les affaires du monde, qu’elle était toujours là prête à tromper tous les calculs. Ces quelques jours qui viennent de passer ont été encombrés de deuils, d’incidens sinistres, de péripéties lugubres, et, comme pour frapper plus vivement l’imagination publique, tous ces coups qui se sont succédé, qui ont atteint les têtes les plus hautes, ont été soudains, imprévus, foudroyans. Le sombre défilé a commencé par ce malheureux ambassadeur d’Autriche, qui a si tristement mis fin à sa vie ; mais ce n’est là évidemment qu’un acte de trouble et d’égarement bientôt effacé par les deuils français qui se sont précipités, qui ont été de douloureuses surprises en même temps que de véritables événemens pour notre pays.

Il n’y a que quelques semaines encore, M. Gambetta était dans la force de l’âge et de la virilité. Malgré les échecs et les mécomptes qu’il avait subis, il gardait un visible ascendant, et si sa politique était l’objet de vives contestations, il restait un personnage puissant sur la scène française. Tout à coup survient un accident en apparence léger, une blessure qu’on dit peu grave. En quelques jours, ce n’est plus la blessure qui a de la gravité, c’est la constitution tout entière du blessé qui est atteinte, qui se décompose rapidement, et, à la dernière heure de l’année expirante, quelques minutes avant que la nouvelle