d’argent de l’obligation de prendre les armes, la populace et les soldats se rendaient sur les montagnes avoisinantes et y prenaient position; la nuit du 18 au 19 fut agitée, et la plèbe mahométane parcourut les rues en hurlant la guerre sainte et en poussant des cris de mort contre les chrétiens de toute nationalité. Les Bosniaques, voyant leur pays envahi par des soldats aussi nombreux, ne pouvaient, en effet, s’imaginer qu’ils appartenaient tous au même empereur, et la diversité des uniformes leur avait fait croire qu’ils avaient affaire à toute l’Europe coalisée.
Le 19 août, avant le jour, la brigade Billecz s’ébranla, précédée de ses hussards et suivie de près par le général Philippovitch, à côté duquel chevauchait Hafiz-Pacha, délégué du sultan, revenu la veille de Serajewo, où il avait été essayer, mais en vain, de faire exécuter les ordres de soumission du kalife. Quelle singulière figure devaient faire ce jour-là le malheureux pacha et le petit état-major turc qui l’accompagnait, au milieu de l’armée qui allait occuper la capitale d’une des plus belles provinces de l’empire ottoman!
La brigade Billecz, appuyée par celle du général Kaiffel, attaqua d’abord les hauteurs qui dominent le village de Svrakinoselo, tandis que, de l’autre côté de la vallée, des pièces de campagne, placées sur la petite colline de Goritsa et soutenues par les brigades Müller et Lemaï, qui formaient l’aile gauche, battaient vigoureusement les positions des insurgés, qui se tenaient surtout en force au fond de la cuvette où se trouve la ville et la citadelle située à mi-côte. D’autres batteries étaient placées sur différens points le long de la rivière Midljaska. Le centre, à cheval sur la route, dans le fond de la vallée, resta, par suite de la configuration du terrain, en réserve toute la matinée. En avant de l’aile gauche, le troisième bataillon du régiment François-Charles no 52 avait de bonne heure pris possession de la colline de Hum et était arrivé, dès neuf heures du matin, jusqu’aux premières maisons de la ville; mais, comme les musulmans étaient parfaitement abrités, il fallut attendre, pour avancer, que l’artillerie eût ouvert un chemin à l’infanterie ; bientôt ce fut chose faite, et la brigade Lemaï planta le drapeau autrichien sur la citadelle, mais elle ne réussit pas à couper la retraite à ses défenseurs, qui s’échappèrent par la route de Mokro. On trouva sur les bastions une trentaine de canons, dont sept, bien approvisionnés de munitions, purent être utilisés par les vainqueurs. Du reste, cette artillerie, mal servie sans doute par les insurgés, n’avait fait aucun mal aux assaillans.
Vers midi cependant, la résistance militaire était brisée partout; mais alors commença une guerre de rues meurtrière qui dura jusqu’au soir. L’acharnement était extrême : des femmes, de tout jeunes enfans tiraient des fenêtres de leurs harems sur les Autrichiens.