veut les tuer tous les deux, mais il médite une vengeance autrement raffinée et qu’il pourra savourer plus longtemps. Le poignard sur la gorge, il force les deux coupables de s’épouser. Idée de comédie. Le drame commence après le mariage. Au su du nouveau marié, il force Catherine, sous les plus terribles menaces, à venir chaque jour dans son atelier comme modèle à tout faire. « Je la faisais poser nue des heures entières dans les attitudes les plus pénibles et les plus fatigantes, ce qui la faisait souffrir autant que cela me divertissait. » Lorsque la malheureuse osait se plaindre, il la battait jusqu’à la laisser morte sur place. C’est lui qui parle : « Je la saisis par les cheveux et la traînai par la chambre en la rossant de coups de pied et de coups de poing jusqu’à ce que la fatigue m’obligeât de m’arrêter. Quand je l’eus bien rossée, elle était couverte de tant d’écorchures, de contusions et d’enflures que je pensai qu’il faudrait la faire soigner au moins pendant quinze jours. » La Catherine guérie, il la rappela et recommença la même cérémonie. « Les mêmes scènes se renouvelèrent plusieurs fois! Elles se ressemblèrent comme les épreuves qui sortent d’un même moule et ne variaient que du plus au moins. « Il est de bon ton de trouver tout cela très drôle, comme François Ier, qui s’amusait fort du maître coup de pied donné au petit élève. Pour nous, nous ne voyons pas qu’il y ait tant à rire.
Et remarquez que ce batailleur si aise de donner des coups ne risque pas volontiers d’en recevoir. Il n’est certes pas poltron. Toutefois, il aime mieux frapper un homme par derrière que de l’attaquer de face. A un adversaire il préfère une victime ; le guet-apens lui paraît plus sûr que le combat ; le duel ne lui déplaît pas, mais l’assassinat l’enchante. Il brutalise les faibles, les femmes, les enfans. Pour assommer de coups la Catherine, il choisit un endroit « où nul ne peut venir à son secours. » Quand il tue Pompeo, il se glisse dans la foule et poignarde son ennemi comme il sortait de la boutique d’un apothicaire. Il agit de même pour tuer l’arquebusier. Après le repas du soir, cet homme prenait le frais sur le seuil de sa porte. Benvenuto longe la muraille, s’approche de lui et le frappe de son coutelas pour lui trancher la tête. L’arme dévie et blesse à l’épaule le soldat qui s’enfuit. Cellini se met à sa poursuite, l’atteint, le terrasse et lui enfonce le coutelas entre la nuque et les os du cou — « avec tant de violence, dit-il, que, malgré tous mes efforts je ne pus retirer l’arme de la plaie. » Ce malheureux, il est vrai, avait tué le frère de Cellini: mais de quelle façon? Dans un combat, d’un coup d’arquebuse à bout portant, en se défendant contre ses attaques furieuses. Que Cellini voulût venger la mort de son frère, c’était dans les mœurs du temps. Mais n’aimerait-on mieux pas qu’il eût chargé cet homme l’épée à la main, au