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IV.

Parmi ces trois grandes régions du vieux monde, la zone centrale est de beaucoup la plus étendue. Avec son extension sur le bassin du Tarim, qui n’ajoute pas grand’chose à sa population, elle occupe au moins un quart de la surface terrestre du globe. À peine aussi peuplée que la zone du nord, beaucoup moins que celle du sud, où se trouvent ces grandes fourmilières humaines de la Chine et de l’Inde, elle n’en a pas moins eu et elle conservera longtemps encore, il faut l’espérer, son rôle prépondérant dans l’histoire de l’humanité. Son bassin le plus important, celui de la Méditerranée, a été le berceau et est encore le foyer de nos civilisations les plus vivaces ; et cette considération seule suffit pour justifier la spécialité de cette étude sur les conditions physiques qui ont pu influencer tant de peuples de races diverses, réunis cependant par des rapport communs résultant de l’uniformité générale du milieu dans lequel ils ont vécu.

En disant que cette région centrale était surtout caractérisée par la sécheresse anormale de son climat, je n’ai point cédé au vague désir de grouper par un signe commun, arbitrairement choisi, des régions d’ailleurs dissemblables. Rien n’est, en fait, plus réel que cette distinction.

Sans doute, il ne saurait y avoir rien d’absolument tranché dans les caractères naturels qui différencient les familles et les espèces, pas plus dans le monde de la matière inerte que dans celui des êtres organisés. De même que, dans les classifications zoologiques, les propriétés distinctives se confondent parfois à la limite de deux familles voisines, de même, sur la zone frontière des grandes divisions géographiques que je propose, on pourra parfois trouver certaines similitudes de contact ; c’est ainsi, par exemple, que la vallée de la Saône a plus de rapports de climat avec les vallées de la Seine et du Rhin, entre lesquelles elle est enchâssée, que ces dernières n’en ont avec la Sibérie, qu’elle n’en a elle-même avec l’Egypte.

On ne doit pas oublier d’ailleurs que les conditions de climat ne sont pas permanentes, en un même lieu. Le grand courant qui en détermine les principaux caractères se déplace avec le soleil dans son mouvement annuel. La zone de sécheresse qui règne continuellement, sur le Sahara central, se reporte sur la cuvette de la Méditerranée avec l’équinoxe du printemps, sur le Soudan africain avec l’équinoxe d’automne. Pendant les saisons opposées, ces régions extrêmes restent plus ou moins longtemps sous l’influence humide