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raison de cet immense développement de parties chlorophylliennes. Les plantes actuelles s’étiolent en effet et se décolorent à l’ombre ; on est donc en droit de se demander si un puissant éclairage n’était pas nécessaire à des plantes aussi luxuriantes de feuillage que celles des houilles, dont la périphérie presque entière, sur les liges et le long des rameaux, était visiblement verte comme les feuilles elles-mêmes et ne perdait cette teinte qu’à la longue, sur les points de l’écorce correspondant aux cicatrices des organes détachés.

Il est certain que la production des grains de chlorophylle, ce pigment vert des plantes, n’a lieu que sous l’influence de l’a lumière et s’affaiblit avec elle. C’est sur cette action verdissante de la lumière qu’est fondé le procédé de jardinage qui consiste à lier les légumes frais pour décolorer les parties intérieures. Au contraire, les plantes exposées au jour deviennent à la fois plus vertes et plus fermes. Mais ce que nous savons des fougères, qui préfèrent l’ombre à un jour trop éclatant, prouve bien que l’intensité lumineuse n’est pas nécessaire dans tous les cas à la genèse des organes chlorophylliens. Il suffit d’une lumière diffuse, tamisée à travers un voile à demi transparent, pour que la végétation soit active. L’opération que l’on fait subir aux vitrages de nos serres en les enduisant de chaux détrempée en est une démonstration journalière. Les plantes exotiques ne sont pas moins vertes sous cet abri, et leur développement se trouve plutôt favorisé par ce procédé.

En combinant ces divers indices, on est amené à conclure que la chaleur toujours égale et humide de l’âge des houilles était engendrée par une lumière « diffuse, » tempérée par un ciel souvent chargé de vapeurs, mais venant aussi d’un soleil auquel l’hypothèse du docteur Blandet s’applique avec plus de vraisemblance encore que pour toute autre période, tellement elle se trouve ; en harmonie avec l’ensemble des observations que l’étude des plantes carbonifères a permis de formuler. Selon cette hypothèse, la contraction du globe solaire aurait été graduelle. Avant d’être ramené à son diamètre actuel, encore énorme relativement, l’astre central aurait occupé antérieurement dans l’espace un périmètre d’autant plus considérable que l’on se placerait plus loin dans le passé. Originairement, par exemple, il aurait excédé l’orbite de la planète Vénus, puis celle de Mercure, et se serait ensuite condensé peu à peu à travers la longue durée des temps géologiques. Aux époques primitives, le soleil aurait ainsi compensé par l’étendue de l’éclairage et l’ampleur apparente de son disque les effets de l’obliquité de l’écliptique. Par conséquent, grâce à une illumination presque constante, accompagnée, si l’on veut, d’interminables crépuscules, l’influence des latitudes se serait trouvée annulée et la zone tropicale aurait débordé au-delà du pôle pour être ramenée ensuite