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les négligea. Il lui en aurait trop coulé d’y avoir recours. Une exploitation régulière des combustibles enfouis aurait exigé des travaux hors de proportion avec les ressources dont elle disposait. À l’aurore des temps modernes, lorsque la métallurgie, la fabrication du verre, des briques, les constructions et les ateliers prirent un essor qui ne s’est plus arrêté, c’est d’abord et avant tout aux forêts que l’on s’adressa, et les déboisemens qui affligent certaines régions françaises datent beaucoup plus de cette époque que des excès qui suivirent la révolution, comme on se le figure généralement. Les forêts une fois ravagées et l’essor industriel continuant, il fallut bien en venir à ce qu’on nommait le charbon fossile. Alors seulement on songea à en exporter des quantités, d’abord assez faibles, des pays producteurs qui regorgeaient de cette substance chez ceux qui en manquaient ou qui n’avaient pas encore appris à en utiliser l’emploi. C’est à 1769 seulement que M. Simonin[1] fait remonter les premiers arrivages de charbon de pierre, expédiés de Newcastle à Paris pour remédier à la cherté du bois.

À cette époque, la science avait déjà fixé les yeux sur le charbon minéral ; elle se préoccupait d’en expliquer la nature et l’origine. C’est au commencement du XVIII siècle que l’on doit placer la première tentative rationnelle de ce genre ; elle est due à l’un des Jussieu, qui présenta, en 1718, à l’Académie des sciences un mémoire intitulé : Examen des caunes des impressions de plantes marquées sur certaines pierres des encirons de Saint-Chaumont dans le Lyonnais. Plus de cent cinquante ans devaient s’écouler avant que le dernier mot fût dit sur cette question de la formation des houilles, résolue maintenant grâce aux recherches de M. Grand’Ëury ; mais si, au début, elle paraissait simple à bien des égards, elle était, au fond, si complexe et entravée, on peut le dire, de tant de préliminaires que l’intervalle écoulé depuis la première intuition jusqu’aux clartés définitives ne semblera pas trop long lorsque nous aurons exposé toutes les difficultés de l’œuvre qu’il s’agissait d’accomplir.


1.

Pour expliquer le charbon de pierre, avant même de chercher à comprendre son mode de formation, il se présentait une première alternative à résoudre : cette substance était-elle un minéral directement engendré par le sol ou bien un produit assimilable à celui que l’homme retire de la combustion du bois ? — En allant au fond des choses, comme on peut le faire actuellement, on aurait vu que

  1. La Vie Souterraine, ou les Mines et les Mineurs, par L. Simonin. Paris, 1867.