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La métallurgie et la fabrication des machines se sont développées en Alsace parallèlement aux industries textiles. Depuis les ressorts délicats de nos montres, dit M. Grad, jusqu’aux machines à vapeur les plus puissantes et au matériel des chemins de for, il n’y a point de mécanisme ni d’instrument que les constructeurs du pays ne soient en état de livrer. Nous trouvons sur notre sol le fer et le cuivre, le plomb et l’argent, l’or même que le Rhin roule dans ses flots mélangé avec le sable. Mais de tous ces métaux, le plus précieux est le fer, dont la fabrication se trouve localisée à Niederbronn, dans l’établissement de MM. de Dietrich et Cie. Cet établissement, fondé en 1685, comprend six usines disséminées dans diverses communes et embrassant toutes les branches de la métallurgie du fer, depuis l’exploitation des mines jusqu’à la construction des machines. Il fabrique annuellement 6,000 tonnes de fontes moulées de toute espèce, 7.200 tonnes de fer et 2,500 tonnes d’aciers corroyés, d’acier Ressemer et d’acier fondu au creuset. L’atelier de construction fabrique surtout des wagons de chemins de fer et des roues de locomotives.

Un autre établissement de constructions est celui de Grafenstaden, près de Strasbourg. Fondé en 1838, il s’adonna d’abord à la fabrication des bascules et des crics ; plus tard, il entreprit celle des machines-outils, puis celle des wagons de chemins de fer et des locomotives. À la suite de l’annexion, cet établissement s’est fusionné avec la maison André Kœchlin et Cie, de Mulhouse, pour former avec elle, au capital de 12,000,000 francs, la Société alsacienne des constructions mécaniques, pour le matériel des chemins de fer et les machines des industries textiles. Le chiffre d’affaires de cette société s’élève à 13,400,000 francs par an. Les ouvriers de ces ateliers, surtout ceux de Grafenstaden, sont réputés pour leur moralité et l’excellence de leurs rapports avec les patrons. Propriétaires pour la plupart d’un petit terrain, ils n’ont jamais fait de grève et se montrent reconnaissans de tout ce qu’on a fait pour améliorer leur sort. Pendant la guerre, alors que l’armée allemande, investissant Strasbourg, donnait à cette ville des preuves de son amour en bombardant la cathédrale, en détruisant des quartiers entiers, en brûlant sa bibliothèque, l’usine ne pouvant payer ses ouvriers, ceux-ci offrirent au directeur leurs propres économies pour le tirer d’embarras. Cette usine est en outre une école d’apprentissage où de nombreux jeunes gens viennent se mettre au courant du métier de mécanicien et trouvent ensuite de l’occupation soit en Alsace, soit au dehors.

Une autre branche d’industrie qui a pris en Alsace une place très honorable est celle de la fabrication du papier. Ce sont les Arabes qui imaginèrent de faire du papier avec des chiffons. Dès le