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0m,30 et des canons de 30 tonnes sans caler plus de 4 mètres, et tournent sur eux-mêmes comme une toupie dont ils ont la forme. Mais tout avantage se paie. À meure qu’un avant moins effilé frayait dans la mer passage à une masse plus épaisse, la route faite par les navires a été plus lente. Le plus mince des navires cuirassés, l’Azincourt, est aussi le plus rapide. Une machine de 6,867 chevaux a pu imprimer à ses 10,627 tonneaux une vitesse de 15 nœuds 43. Le Duilio, qui a le même tonnage, ne reçoit d’une machine de 7,500 chevaux qu’une impulsion de 14 nœuds. Il est long de 103 mètres, a 18m,33 de large et moins de 8 de profondeur. Le dernier terme de cette décroissance est la popofka, comme elle n’est pas plus longue que large, elle marche par le flanc ou en avant avec une égale facilité ; mais comme elle fend l’eau avec une largeur de 36 mètres, une machine de 3,600 chevaux ne peut imprimer à ses 4,800 tonneaux une vitesse de plus de 7 nœuds. La loi de ces constructions peut se formuler ainsi : ce qu’un navire gagne en faculté giratoire, il le perd en faculté de marche directe.

Laquelle est la plus nécessaire ?

Il y a un art plus grand que de livrer des luttes heureuses, c’est de vaincre sans avoir besoin de combattre. Décider la nature des opérations et leurs théâtres, occuper le premier les positions dominantes, déconcerter par une attaque maîtresse de tous ses moyens une défense encore en formation, c’est devancer les batailles, et par la perfection des plans atteindre son but sans traverser le hasard la prépondérance des forces, les surprises ? La rapidité de marche en avant. Sur mer comme sur terre, elle est maîtresse de toute stratégie. La subordonner à la facilité d’évolution n’est pas subordonner la stratégie à la tactique, mais compromettre l’une et l’autre. Si aptes que soient des navires aux manœuvres du champ de bataille, l’ennemi plus rapide est maître de commencer la lutte, maître de la finir, assuré de sa retraite. Moins les navires se porteront avec promptitude d’un des mêlées. Or qui permet l’offensive, le choix des champs d’action, point à un autre, plus il en faudra pour suffire au même service ; encore courront-ils risque d’être battus en détail par des forces au total moins considérables, mais plus faciles à concentrer, et grâce à la rapidité de sa course, la marine la moins nombreuse peut l’emporter même par le nombre, chacune de ses unités se trouvât-elle inférieure. D’ailleurs, où apparaît cette infériorité ? Dans les combats par le choc ? On sait quelle importance leur reste. Préparer les navires pour ces passes d’armes, c’est sacrifier des qualités d’une importance constante et capitale à des qualités sans emploi. Dans les joutes d’éperon même, si elles ne disparaissaient pas. L’avantage appartiendrait-il aux manœuvriers ou aux marcheurs ? Dans le premier élan qui les porte l’un sur l’autre, la supériorité est faite par