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de mauvaise vie de New-York et de Boston sortaient en grande majorité des écoles publiques. Au point de vue moral, l’expérience qui se poursuit de l’autre côté de l’Atlantique est donc loin d’être concluante. Plaise à Dieu que celle que nous sommes à la veille de tenter n’apporte pas dans le sens le plus fâcheux des argumens trop décisifs !


NEW-YORK.

4-9 novembre.

Lorsqu’après s’être quelque peu promené à travers les États-Unis, on revient à New-York, plus que jamais on trouve qu’elle mérite son surnom de cité impériale. C’est bien la capitale des États-Unis, en ce sens qu’auprès d’elle toutes les autres villes paraissent des villes de province. Aujourd’hui encore, après bien des mois écoulés, lorsque je cherche à me rappeler quelques-unes de mes impressions les plus vives, la rade de New-York, Broadway, Fifth Avenue, Madison Square, sont les premiers tableaux qui apparaissent devant mes yeux. C’est donc avec un plaisir infini que je m’y retrouve, peut-être aussi parce que nous y retrouvons les figures amies de ces membres du comité avec lesquels nous avons passé de si agréables jours, et pour moi en particulier parce que j’échange pour la première fois la vie d’hôtel, toujours un peu fatigante, contre l’hospitalité d’un aimable jeune ménage, chez lequel j’ai pu étudier et goûter le confort, le charme, la douceur du home américain. Aussi les cinq jours que j’ai passés dans leur société sont-ils demeurés pour moi un souvenir véritablement cher. Jamais non plus, je crois, le sens de a curiosité n’a été surexcité chez moi à un aussi haut degré que durant ces cinq jours. Dans cette immense ville je voudrais tout voir, tout visiter, tout connaître, et encore, pour comble de malheur, le peu de temps que j’ai ne m’appartient pas complètement, car deux de mes soirées sont retenues à l’avance, l’une par un bal que nous donne un comité spécial choisi dans la meilleure société de New-York, l’autre par un banquet que nous offre la chambre de commerce.

Le bal a été fort élégant, et c’est la première fois qu’on a vu, je crois, le drapeau blanc ombrageant un écusson fleurdelisé se marier dans une même décoration avec un drapeau tricolore surmontant les initiales de la république française. Mais le banquet m’a davantage intéressé, comme étant un spectacle plus américain. Nous nous sommes mis à table à six heures et demie et nous y serions restés, je crois, jusqu’au lendemain matin si le président n’avait annoncé (c’était un samedi soir) que tous les discours devaient être terminés