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ouvert, qu’il ne se clorait pas sans qu’Alger, ce nid de pirates, possédât une université? Et qui peut aujourd’hui douter que, le temps aidant, la première université africaine n’atteigne une grande prospérité ? Il faudrait seulement lui donner un caractère un peu original en y développant, ce qui existe déjà en embryon, les cours concernant la langue, la littérature, l’histoire, le droit arabes. Il ne nous paraît pas que l’enseignement dit spécial, les écoles d’arts et métiers et les écoles professionnelles, tiennent jusqu’ici en Algérie une place importante. Il conviendrait d’y pourvoir: c’est la branche d’enseignement la plus productive dans un pays neuf.

Tant de progrès accomplis ont dû exiger bien des sacrifices. La France ne se les est pas épargnés, et elle ne les ménage pas encore. Cependant, sa colonie commence à lui revenir moins cher. Sans être exceptionnellement brillantes, les finances algériennes sont assez satisfaisantes. On sait que le budget de l’Algérie est mêlé au budget métropolitain, ce qui nous paraît une organisation vicieuse. On enfle ainsi, d’une manière apparente, les dépenses de la France continentale et l’on rend fautives les comparaisons de notre budget actuel avec le budget d’il y a trente ou cinquante ans. Depuis surtout que l’on a rattaché les divers services algériens aux différens ministères métropolitains, on est tombé dans la confusion. On a eu néanmoins l’heureuse idée, pour sortir des ténèbres, de grouper dans un tableau annexe, après les avoir antérieurement dispersées, toutes les recettes et les dépenses du gouvernement général de l’Algérie. Les dépenses ordinaires sont prévues au budget de 1883 pour un chiffre de 31,189,000 francs; les dépenses sur ressources extraordinaires pour 3,879,000, et le budget sur ressources spéciales monte à 3,199,000 francs : c’est un ensemble de 38,267,000 fr., non compris les dépenses des localités. Ce petit budget d’une quarantaine de millions de francs pour un pays de 3,300,000 habitans, dont les quatre cinquièmes vivent encore dans un état barbare, pays d’ailleurs qui n’entretient pas d’armée ni de marine, puisque la France se charge de ce soin et qui en outre n’a pas de dette publique, puisque c’est la France qui jusqu’ici a payé les insuffisances du bilan de l’Algérie, ce petit budget ne laisse pas que d’être assez important. Sauf les dépenses sur ressources extraordinaires évaluées à 3 millions 800,000 fr. en chiffres ronds pour 1883, ce sont des ressources purement algériennes qui défraient tous les services. Les revenus généraux produisent en effet 31,451,000 francs, dont 6,317,000 francs de contributions directes sur les Arabes, 3 millions de produits domaniaux, 7 millions de droits de timbre et d’enregistrement, 7 millions l/2 de droits de douane, 2 millions 1/2 de contributions diverses, près de 3 millions de recettes postales et télégraphiques, et quelques autres ressources de moindre importance, parmi lesquelles