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pour le chancelier allemand. Chaque nouvel emprunt émis en France est aussitôt souscrit à plusieurs fois son montant, et les capitalistes étrangers ne sont pas les moins prompts à y prendre part. Lorsque le gouvernement allemand, à court d’argent au début de la campagne de 1870, dut faire appel au crédit national, le patriotisme des capitalistes du pays n’avait encore souscrit, aux journées de Froeschwiller et de Spicheren, que 225 millions sur l’emprunt de 300 millions ouvert pour la confédération au cours de 88 pour 4 francs d’intérêt. L’empressement des Allemands à porter leurs épargnes à « l’ennemi héréditaire, » quand ils se montrent si réservés pour les contributions destinées à affermir l’œuvre de l’unité nationale, peut provoquer des commentaires peu avantageux sur le crédit de l’état et sur ses ressources financières. La vérité est que les ressources de l’Allemagne sont moins misérables qu’elles ne le paraissent par les votes des assemblées législatives, qui recommandent l’économie à leur gouvernement et lui disputent avec âpreté tout nouvel impôt. Que si un danger sérieux devait menacer la patrie, ne doutons pas non plus que le Reichstag n’accorde au chancelier de l’Empire tous les crédits nécessaires pour la défense du territoire, et l’adoption des projets de réformes fiscales à l’ordre du jour avait, dans tous les cas, pour efTet d’améliorer la situation des finances des états particuliers, en écartant les déficits constatés dans leurs budgets actuels.


Ⅳ.

Les projets de réforme fiscale, dont le parlement allemand est saisi depuis plusieurs années, soulèvent des discussions très vives et agitent profondément l’opinion publique. Sans les défiances excitées par le prince de Bismarck au sein des différens partis qui sont aux prises avec sa politique, la plupart des projets seraient adoptés dès maintenant. Au point de vue purement économique, il s’agit d’améliorer les finances de l’Allemagne, celles de l’Empire comme celles des états particuliers, au moyen d’une réduction des contributions directes, compensée par une augmentation proportionnelle des impôts indirects. Rien de plus simple ni de plus rationnel en apparence que ce changement parfaitement motivé par la disproportion actuelle des charges établies dans le système fiscal en vigueur. Dans le budget d’aucun autre grand état de l’Europe les impôts indirects ne sont aussi faibles par rapport aux contributions directes. Tout le monde est d’accord sur ce fait et disposé à y porter remède. Seulement on redoute d’ouvrir au gouvernement de l’Empire de nouvelles sources de revenu. Le chancelier, pour prouver que la réforme doit servir tout d’abord au dégrèvement des