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LES
MARINES DE GUERRE

I.
LES GUERRES NAVALES.

Il y a des siècles prudens, que la nouveauté inquiète et que la tradition gouverne. Il y a des siècles aventuriers, que leur vocation pousse à la découverte. Le nôtre est des seconds : rien n’y dure que le changement. Si le culte du passé a été quelque part une loi, c’est dans la science des armes ; aujourd’hui, pour trouver ce qu’elle veut devenir, elle s’efforce d’oublier ce qu’elle lut, et rien peut-être ne se modifie à l’égal des marines de guerre. Les plans se succèdent et se remplacent dans la pensée incertaine des nations, et elles se contredisent sans inconstance, esclaves elles-mêmes des bouleversemens qu’apportent la science aux moyens de lutte et la politique dans l’équilibre du monde. Toutes travaillent à cette révolution, beaucoup n’en mesurent pas l’étendue ; les moins faites pour la comprendre sont les peuples tiers d’un vieil état maritime et peu disposés à admettre qu’aucune nouveauté le rende inutile. À l’heure présente, un établissement naval entouré de traditions est pour eux un grand danger, s’ils en viennent à croire qu’il leur donne une force ou plus de loisir pour se transformer. Le cours habituel des choses est ailleurs assez insensible pour qu’une part du passé