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l’Empire les nouveaux impôts pour lesquels le Bundesrath, représentation des souverains et des gouvernemens particuliers, n’a déjà plus la force de refuser son consentement. Si le régime absolutiste auquel tend le prince de Bismarck ne s’établit pas et n’absorbe pas toutes les forces vives de la nation, le mérite n’en reviendra pas aux souverains des états particuliers, mais à la résistance opposée au nom du peuple par ses députés au Reichstag. N’en doutons pas, le peuple aura le dernier mot.

En attendant, la constitution impose le service militaire à tous les sujets allemands sans exception, sans possibilité de se faire remplacer dans l’accomplissement de ce devoir. Toutes les troupes allemandes sont tenues d’obéir sans conditions ni restriction à tous les ordres de l’empereur ; chaque soldat s’engage à l’obéissance par le serment du drapeau. Comme commandant supérieur de l’armée allemande, l’empereur fixe l’état de présence et la division des contingens à fournir par les états particuliers, ainsi que l’organisation de la landwehr. Des inspections spéciales lui permettent de faire constater à tout moment que les troupes des différens états sont en nombre et en mesure d’entrer en campagne. Afin de maintenir l’unité dans l’administration, l’entretien, l’équipement et l’armement de tous les corps, les ordonnances et les règlemens propres à l’armée prussienne s’appliquent à toutes les troupes de l’Empire. Les régimens, quoique recrutés dans des ressorts répondant aux territoires des états particuliers, ont des numéros d’ordre suivis pour toute l’armée allemande, sans distinction de pays. Une disposition de la constitution de la confédération de l’Allemagne du Nord avait déjà établi que, « pour l’habillement, les couleurs et la coupe de l’uniforme prussien serviraient de règle. » Appliquer la législation militaire prussienne ne suffisait pas pour l’unité ; il fallait encore le signe extérieur de l’uniforme, pour pénétrer chaque sujet de l’idée que le régime allemand s’identifie complètement avec le régime prussien. Rien n’a été négligé non plus pour l’exécution des mesures à prendre dans l’intérêt de la stratégie : l’empereur a la faculté de faire élever des ouvrages de fortification sur tout le territoire de l’Allemagne, et l’administration de l’Empire comprend un office spécial des chemins de fer, chargé particulièrement du service des voies ferrées au point de vue militaire. La constitution prévoit aussi l’émission d’emprunts pour suppléer à l’insuffisance des ressources ordinaires, en cas de construction de fortifications ou de voies ferrées, qui sont jugées nécessaires dans l’intérêt de la défense du territoire. D’après l’article 41 de la constitution, non-seulement le gouvernement impérial a la surveillance de l’exploitation des chemins de fer sur toute l’étendue de l’empire allemand, mais il peut établir ou faire exécuter de nouvelles lignes sur le territoire