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cours de la Tamise de Charing Cross à Temple Bar). Jusqu’en 1680, Sainte James square, Pall Mall, servaient de pâturages. Au début du XVIIIe siècle, Hackney, Nevrington, Marylebone, étaient des villages dans la campagne fort éloignés de la capitale. Marylebone était le plus proche, mais, jusqu’aux premières maisons de Londres, il y avait bien un bon mille de champs. C’était vers l’ouest, là où se trouvaient les demeures des gens riches et de l’aristocratie, que la ville s’étendait. Lord Burlington, sous Charles II, avait construit son grand palais dans Piccadilly, afin de n’avoir pas de maisons au-delà de son habitation et d’être à la limite extrême de la ville. Moins de cinquante ans après, Burlington house était au cœur même du West End, entouré de rues nouvelles de toutes parts. A l’exception de quelques villages épars, au XVIIe siècle, l’espace occupé par les quartiers de Belgravia, de Chelsea, de Kensington, de Saint John’s Wood, était une plaine couverte de champs et de jardins. C’était en quelque sorte une collection de villes qui avaient poussé au hasard, sans plan fondamental, sans unité de dessein, sans cohésion ; elles avaient grandi l’une à côté de l’autre, sur les deux rives de la Tamise, de Battersea jusqu’à Blackwall. Aujourd’hui que Londres forme un tout compact, sans espaces vides intermédiaires, la ville ne cesse de grandir, mais l’augmentation de population se fait d’une façon entièrement périphérique. Au centre, il existe une dizaine de districts qui forment comme un noyau ; — la population y diminue constamment par suite de la substitution des magasins et des bureaux aux logemens d’habitation. Dès que la nuit tombe, les négocians et leurs commis émigrent et retournent au logis. Pour ne parler que de la cité, le nombre des habitans est tombé de 129,000 en 1853, à 74,000 en 1881.

Autour de ce centre qui s’appauvrit, il existe un cercle de districts formant partie de Londres et qui tous voient augmenter leur population d’une manière plus ou moins rapide ; — cette augmentation est d’autant plus grande qu’on s’éloigne davantage du centre. En dehors de ce cercle, séparée de la capitale seulement par une ligne arbitraire, vous trouvez une autre zone dont le développement est encore plus prompt ; — en vingt ans, la population présente une augmentation de 104 pour 100.

Il peut paraître étrange que les habitans de la cité de Londres n’aient pas eu l’ambition d’étendre au fur et à mesure leur corporation à la ville qui naissait autour d’eux. L’autorité de leur administration se bornait à la cité même, aux quartiers extérieurs, à Southwark enfin, qui s’était créé à l’autre bout de London Bridge. En ce qui concernait le gouvernement intérieur, l’administration des affaires locales reposait sur des bases qui assuraient aux habitans une représentation suffisante de leurs intérêts et de leurs besoins.