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plus ou moins sensibles qu’il retient de quelques autres corps associés au fer dans la fonte ou les minerais. L’acier présente ainsi des variétés infinies qui forment une série presque continue, si bien qu’il est souvent difficile de dire où finit le fer et où commencent les aciers, où finissent ces derniers et où commencent les fontes.

Les sources qui nous fournissent le fer sont toujours les nombreux minerais qui le renferment à l’état d’oxyde ou de carbonate, et c’est à l’état de fonte qu’il sort des hauts fourneaux. Or la fonte, en dehors d’une forte dose de carbone, contient d’ordinaire des quantités plus ou moins appréciables des autres élémens du minerai, tels que le manganèse, le silicium, le soufre, le phosphore, et pour avoir du fer doux, il faut l’affiner, c’est-à-dire brûler le carbone et les autres corps étrangers, qui s’éliminent sous forme de fumée ou de scories. Enfin l’acier peut s’obtenir de plusieurs manières différentes : par l’affinage incomplet de la fonte, en y laissant une certaine proportion de carbone, — par la carburation du fer, méthode qui fournit l’acier cémenté, — par un mélange en proportions convenables du fer et de la fonte, comme l’avait proposé Réaumur, etc.

Parmi les progrès qui se remarquent dans la fabrication de la fonte, les plus importans sont l’économie de combustible réalisée par l’emploi du vent, surchauffé, et les changemens apportés aux transports de minerai. L’emploi d’air préalablement chauffé au lieu d’air froid pour l’insufflation dans les tuyères des hauts fourneaux était un perfectionnement connu des maîtres de forges écossais depuis cinquante ans : le vent fourni par les machines soufflantes était lancé dans des sortes de calorifères en fonte, chauffés par les gaz combustibles qui s’échappaient du gueulard, et qui, mélangés d’air, venaient brûler tout autour ; avant son entrée dans les tuyères, la température du vent s’élevait ainsi à 300 ou 400 degrés, limite imposée par l’usure rapide des calorifères de fonte. On réussissait, par ce moyen, à économiser 20 ou 30 pour 100 du combustible ; en même temps, la conduite des hauts fourneaux devenait plus facile, et dès 1862 il y eut des appareils fournissant (avec des minerais riches) jusqu’à 100 tonnes de fonte par jour, au lieu de 5 ou 10 tonnes que produisaient les hauts fourneaux vers 1830. L’application du principe des fours Siemens, qui consiste à emmagasiner la chaleur dans des lits de briques réfractaires qui la gardent longtemps et la cèdent lentement, a permis d’aller beaucoup plus loin dans cette voie. Les appareils de chauffage de E. Cowper et ceux de Th. Whitwell permettent de porter la température du vent jusqu’à 700 degrés et même au-delà. Un appareil Whitwell se compose d’un cylindre de tôle, doublé de briques. On y introduit d’abord les gaz combustibles qui sortent du gueulard, avec la quantité d’air nécessaire pour les brûler ; la flamme circule dans cette sorte de calorifère, qui communique avec une cheminée d’appel, et bientôt toute la masse des