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lui-même, qui est à une élévation de 1,200 mètres environ et qui a 80 kilomètres de long sur 15 de large, diminue journellement de profondeur. Les rives en sont basses, presque inabordables et c’est avec difficulté qu’on peut naviguer en bateau au milieu des bancs de sable ; ce qui prouve que ce lac était autrefois plus étendu, ce sont les nombreux squelettes et défenses d’éléphans qu’on trouve enfouis dans le voisinage. Ce sont ceux d’animaux qui venaient boire dans le lac et qui ont été dévorés par des carnassiers, et dont la carcasse a été engloutie dans les vases aujourd’hui solidifiées.

Le désert de Kalahari, dont les plaines arides s’étendent comme on sait entre le fleuve Orange et le Zambèze, vers le 20° degré de latitude, s’élargit tous les jours ; il mord incessamment sur les terres qui l’entourent et remplace par des broussailles les cultures qui les couvraient. Les sources s’y tarissent, les cours d’eau disparaissent et les lacs s’y dessèchent en laissant une couche de sel scintiller au soleil. Les habitans, hors d’état de se nourrir, émigrent vers des régions moins déshéritées et cèdent la place aux animaux féroces, qui s’y multiplient sans obstacle.

Le même phénomène se manifeste sur d’autres points du continent africain. Ainsi M. E. Reclus, dans sa Géographie, fait remarquer que, du temps des Romains, le désert du Sahara était moins étendu qu’aujourd’hui ; qu’on y trouvait des palmiers en abondance, de nombreuses oasis et des rivières dont il ne reste plus aujourd’hui que les lits. Les chotts du sud de l’Algérie, qu’on a supposés à tort avoir jadis été en communication avec la mer, étaient sans doute des lacs qui, comme ceux de l’Afrique australe, se sont desséchés à une époque relativement récente.

Tous ces faits et des milliers d’autres dont il est fait mention dans les récits des voyageurs ou dans les mémoires adressés aux sociétés savantes prouvent d’une façon incontestable que, depuis les temps historiques, toute cette partie de l’Afrique s’est desséchée, et que ce dessèchement et l’aridité qui en est la conséquence se continuent sous nos yeux.

A quelles causes faut-il attribuer ce phénomène d’où dépend l’avenir de la colonie ?


II

D’après M. Brown, ces causes sont multiples. Il y en a de générales qui résultent de la constitution géologique du sol ? et de locales qui, dans une certaine mesure, dépendent de l’action de l’homme. Parmi les premières, la principale est le soulèvement graduel du continent africain, dont on trouve la preuve en examinant les