avons pris à New-York pour veiller sur nos bagages et qui, s’étant faufilé dans nos rangs à notre insu, a profité de l’occasion pour venir sans façon serrer la main du président du sénat.
Nous employons les deux jours qui nous sont laissés à visiter la ville de Washington, ce qui demande beaucoup de temps (à cause des magnifiques distances), et ses environs, qui sont fort beaux. Mes lecteurs ne me demanderont pas de leur décrire le Capitole : cette description se trouve partout, et, si j’avais même à dire ce que j’en pense, je serais assez embarrassé. La façade a une incontestable grandeur, avec ses deux ailes, son portique et ses trois escaliers. Mais c’est la portion qu’on voit le moins, parce qu’elle regarde cette partie quasi-déserte de Washington, où il n’y a ni habitations privées, ni bâtimens publics. La coupole a beaucoup de hardiesse, mais elle écrase le portique, qu’il est au reste question de surélever. Les ailes sont en marbre blanc, mais le bâtiment du milieu est en pierres peintes ; la coupole est en fonte ; en un mot, tout l’ensemble a quelque chose à la fois de majestueux et d’incomplet. On sent que l’architecte, les architectes plutôt (car le Capitole a été construit en plusieurs fois) se sont propose de dépasser Saint-Pierre ; ils n’ont réussi qu’à provoquer une comparaison redoutable. Pour moi, décidément, j’aime mieux la vue de Saint-Pierre, bien que la façade du Bernin ne soit pas non plus sans reproche ; mais la disposition de l’église et de la place, avec cette élégante colonnade circulaire qui, contenant en quelque sorte le regard, le force à se reporter sur la façade, arrive à une combinaison de grâce et d’harmonie dans le grandiose auquel n’atteint point le Capitole, entouré qu’il est de terrains vagues ou de maisons modernes. Tel n’est pas l’avis d’un Washingtonien avec lequel je discute cette question délicate et qui, du reste, n’a jamais visité l’Italie. « Combien a coûté Saint-Pierre ? » me demande-t-il. Je suis obligé de lui avouer que je n’en sais rien, et sur ce point capital mon ignorance l’étonné. Le Capitole a coûté 65 millions.
Washington est la ville des ministères, et la visite de ces grands bâtimens publics fait partie du programme indiqué. On met infiniment de bonne grâce à nous les montrer dans tous leurs détails. Ce sont de très belles constructions de style ionien ou dorique, d’une architecture un peu massive, mais d’aspect assez imposant. Trois ministères et des plus importans, le département d’état, le département de la guerre et celui de la marine, sont réunis dans un même bâtiment, ce qui épargne du chemin aux solliciteurs. Il y a des solliciteurs même en Amérique. La disposition intérieure de ces ministères est semblable en plus grand à celle des hôtels de ville que nous avons visités : de larges couloirs servant de dégagement à d’immenses salles où les employés travaillent en commun ; des