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autre loi ou règlement, soit de sa propre initiative. Le vali, n’étant nullement lié par les décisions du conseil d’administration, aura toujours la responsabilité de ses actes. » Dans un pays comme la Turquie, cette dernière disposition était excellente. La commission internationale l’a pourtant supprimée, et voici celle qu’elle lui a substituée : « Dans toute mesure administrative qui ne consisterait pas dans l’application pure et simple d’une disposition légale ou réglementaire, mais dont l’application exigera au préalable une discussion des différens intérêts engagés, le vali sera tenu de s’en rapporter à la décision du conseil. Il faudra un iradé impérial pour l’autoriser à appliquer une mesure désapprouvée par le conseil. » Rien de plus libéral en apparence, rien en réalité de plus dangereux. Personne ne sait ce que c’est qu’une loi ou un règlement en Turquie ; les attributions du conseil s’étendront par conséquent à tout. Quand on dit d’ailleurs que sa décision sera souveraine pour « toute mesure dont l’application exigera au préalable une discussion des différens intérêts engagés, » c’est lui accorder précisément le pouvoir de trancher les affaires qui se règlent au moyen de bakchichs, c’est lui livrer l’administration tout entière, c’est lui permettre, à l’exemple du méghiz d’Andrinople, de se charger même des fournitures militaires, des vivres et des munitions de l’armée ; c’est, en un mot, lui permettre de donner une régularité apparente à la corruption profonde sous laquelle gémit la Turquie.

Le liva ou sandjak est organisé sur le modèle du vilayet. Il est dirigé par un mutessarif (gouverneur), nommé par iradé impérial. D’après le projet de la commission internationale, si le mutessarif est musulman, il doit avoir un mudir chrétien pour auxiliaire et vice versa. Le mutessarif a sous ses ordres : 1o un mouhassébedji, chef comptable ; 2o un chef percepteur ; 3o un caissier ; 4o un chef de la correspondance. Il est assisté d’un conseil composé, d’après le projet ottoman, de six membres élus par la population moitié musulmane, moitié non musulmane, du mufti, des chefs religieux, du mouhassébedji et du directeur de la correspondance. Dans les villes où il y a plusieurs communautés religieuses, les chefs de ces communautés se succéderont à tour de rôle. Dans le projet de la commission internationale, la composition est la même, sauf que les six membres électifs sont nommés par le conseil d’administration des cayas. À la tête du caya est un caïmakan nommé par iradé impérial, avec un muavin, musulman ou non, suivant les circonstances. Ces agens sont : 1o un mal-mudiri, chef financier ; 2o un caissier ; 3o un percepteur ; 4o un chef de la correspondance ; 5o un secrétaire pour le cadastre ; 6o un secrétaire pour la statistique et le recrutement de la population. Le conseil est composé, d’après le