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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 janvier 1882.

Jusqu’ici, ce qui s’est passé depuis l’avènement du nouveau ministère, depuis deux mois bien comptés, n’a été qu’un préliminaire, et, si l’on nous permet le mot, la préface d’une œuvre qui avait à se dessiner, à se dégager d’une certaine confusion. Tout s’est réduit, pendant ces deux mois, sans parler de la courte session de décembre, à quelques déclarations sommaires, à des arrangemens d’entrée au pouvoir, à des choix de personnel plus ou moins contestés, à des incertitudes d’opinion, à des explosions de surprise ou de mauvaise humeur et à des polémiques bruyantes. Aujourd’hui, la période des préliminaires est finie; c’est l’œuvre même, c’est l’action décisive qui va sérieusement commencer. C’est la vraie campagne qui s’engage avec l’ouverture du parlement, avec une chambre des députés qui n’a pas eu encore bien le temps de se reconnaître, un sénat qui vient d’être renouvelé et un ministère qui n’a pas décidément grandi depuis ces deux mois, qui, placé entre les deux assemblées, a sa politique à préciser et à expliquer, sa position et son ascendant à reconquérir. Il n’y a plus à reculer désormais. Idées de gouvernement, programme de révision constitutionnelle, réformes administratives, militaires ou financières, tout doit se traduire en projets et en votes. Le chef du cabinet, M. Gambetta, réussira-t-il à se débarrasser des interpellations qui l’attendent, à faire accepter la révision constitutionnelle telle qu’il la comprend, à dominer ses adversaires, à rallier ses amis récalcitrans, à sortir victorieusement, en un mot, des confusions amassées autour de lui? N’aura-t-il, au contraire, passé au ministère que pour ajouter en deux mois un chapitre de plus à cette éternelle histoire de la grandeur et de la décadence d’un prétendant ambitieux et déçu? C’est là vraiment la question qui s’agite dans les conversations, dans les polémiques de tous les jours, en attendant qu’elle soit débattue et tranchée à la pleine lumière des débats