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avait suspendu les achats de chevaux pour la remonte, on avait renoncé à appeler les réserves pour les exercer et on manquait d’armes à leur donner : de semblables économies ne pouvaient se prolonger. Enfin, on lui démontrait qu’il ne satisfaisait pas à la condition essentielle et acceptée par lui de mettre hors d’atteinte l’équilibre du budget. C’était là, en effet, le point faible de l’argumentation de M. Magliani. Il réussissait à établir, par des calculs minutieux et qu’on ne pouvait accuser d’optimisme, que les recettes ordinaires, pour chacun des quatre exercices suivans, présenteraient un excédent sur les dépenses ordinaires, bien que cet excédent dût être très faible pour les années 1881 et 1883 ; mais quand il faisait la récapitulation générale de toutes les dépenses imputables à chaque exercice, il était contraint de reconnaître que les années 1881 et 1883 présenteraient ensemble un déficit final de 12 millions. Ce déficit serait plus que couvert par les 34 millions d’excédens de recettes que donneraient les années 1879, 1880 et 1882. La dette flottante serait réduite, dans les trois années prospères, des millions dont on serait contraint de l’accroître dans les deux années moins favorables, et le résultat final de la période serait à l’avantage du trésor public.

Cette argumentation était plus spécieuse que solide. Quelque rigueur qu’il eût apportée dans ses calculs, le ministre ne pouvait répondre de l’avenir. Une différence de quelques millions suffisait à changer en déficit l’excédent qu’il espérait pour trois années et à aggraver le déficit qu’il prévoyait pour les deux autres. Était-ce sur des données aussi conjecturales et sur la foi de simples espérances qu’on pouvait s’exposer à porter un coup funeste aux finances italiennes et à retarder indéfiniment leur rétablissement ? Le sénat repoussa donc le projet de loi lorsqu’il arriva devant lui : il ne voulut admettre que la suppression, à partir du 1er  juillet 1879, du droit sur les grains inférieurs, qui entraient pour 22 millions dans le produit total de l’impôt. La chambre des députés adhéra à la décision du sénat sur ce point, mais elle vota à nouveau la suppression du droit de mouture sur le blé en le répartissant sur quatre années à compter du 1er  juillet 1880. Quant aux lois d’impôts, elle en ajourna une partie comme conséquence du vote du sénat ; elle vota seulement les augmentations de droits sur les sucres et les denrées coloniales, mais en les subordonnant à la suppression du droit de mouture sur le blé et pour être appliquées en même temps.

L’échec de ses propositions avait déterminé la retraite de M. Maghani, qui avait cédé le ministère des finances à M. Grimaldi ; mais son portefeuille lui fut rendu au bout de quelques mois comme au