Page:Revue des Deux Mondes - 1882 - tome 49.djvu/103

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

laquelle il fallait marcher. On peut considérer comme une des conséquences de ce vote le renoncement à toute émission nouvelle, à partir des derniers mois de 1875.

L’instabilité des ministères, qui n’arrivaient au pouvoir par l’effort d’une coalition que pour en être immédiatement précipités par une coalition nouvelle, et dont aucun ne dépassait la durée d’une session, n’avait pas permis jusque-là d’apporter dans la conduite des finances ces vues d’ensemble et cette suite qui, seules, peuvent produire des résultats sérieux. Cet état de choses changea avec l’année 1876, qui marque le début d’une période nouvelle. La droite parlementaire essuya dans les élections une défaite assez complète pour lui enlever toute possibilité de ressaisir le pouvoir. La gauche s’empara de la direction du gouvernement et elle l’a conservée depuis lors. Ce n’est pas que les crises ministérielles soient devenues beaucoup moins fréquentes : les rivalités personnelles et les querelles privées jouent un rôle trop considérable dans la vie parlementaire de l’Italie pour qu’aucun cabinet soit jamais assuré du lendemain ; mais les oscillations politiques se sont réduites au déplacement de quelques ministres : elles n’ont point porté atteinte à la prépondérance de la gauche. Les chefs du parti sont arrivés au pouvoir, en mars 1876, avec un programme qui leur était commun à tous et dont l’exécution, pour être parfois confiée à des mains différentes, n’a jamais été interrompue.

A côté des réformes politiques dont nous n’avons pas à nous occuper, le programme des chefs de la gauche annonçait des réformes économiques et financières en tête desquelles figuraient la suppression de l’impôt sur la mouture et la suppression du cours forcé. L’année 1876 avait donné des résultats encore plus favorables que ceux de l’année 1875 ; l’excédent des recettes sur les dépenses s’était élevé de 13 à 20 millions. M. Depretis, alors ministre des finances, s’autorisa de ce nouveau progrès pour présenter, le 27 mars 1877, un projet de loi destiné à préparer l’abolition du cours forcé. M. Depretis proposait d’inscrire annuellement au budget un crédit de 20 millions affecté au retrait graduel du papier-monnaie, en attendant que la situation budgétaire permît de contracter un emprunt dont le produit serait consacré au retrait de tous les billets en circulation. Tout le monde rendit justice aux vues de M. Depretis; néanmoins, il ne fut point donné suite à son projet. La rente italienne oscillait entre 70 et 75 ; la possibilité de contracter un emprunt considérable à des conditions qui ne fussent pas trop onéreuses pour le budget paraissait encore fort éloignée, et il ne semblait pas que le retrait annuel de 20 millions de billets pût de longtemps exercer une action sensible sur une circulation qui approchait de